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Eralys
Par Rainn le 18/6/2002 à 21:14:36 (#1680512)
"Des ailes silencieuses
Immatérielles , elles veillent
Leur vol , oppressant et sombre
Etouffe mes cris de renaissance
Des cris , hors des décombres ..."
Un matin baigné de rosée , un matin encore innocent , naissance immaculée et sans histoires , page blanche encore vierge , le décor est planté . Sous la bienveillance d'un soleil flambant de mai , tout renaît , un nouvel univers prend vie , dans chaque rivière , dans chaque fleur..
Elle , se réveillait , une lumière diffuse avait investi sa chambre , se déversant par les larges fenêtres , les rayons tissaient des toiles étincelantes , qui frôlaient son visage tranquille , Elle , se réveillait .
La paix rayonnait sur la plaine d'Eralys , une journée naissante , pleine de clarté , avait attendu le réveil de Lüncha pour laisser éclore la splendeur d'un nouvel univers éphémère ; une journée prête à se consumer , une simple et insignifiante journée , perdue dans l'histoire multi-millénaire de cette terre ..
Elle menait une vie d'aventures , une vie sans but ni espoir , une vie derrance , vagabonde et sauvage à souhait ... Elle écumait les pays , les empires , côtoyait les rois et les paumés , puis disparaissait comme par magie , sans laisser de trace , sa silhouette glissait sur les vents sans jamais se poser , elle refusait de s'établir , pour ne pas cristalliser et renforcer les contradictions qui la torturaient depuis tant d'années , elle fuyait . Traversant les forêts pour s'imprégner dune paix sereine , de la sagesse des arbres , de létat de pure nature , qui offrait , dans les contrées dEralys , des horizons , des paysages magnifiques , puis les villes bruyantes et cacophoniques , débordantes de vie et dexcitation , elle s'ignorait , et cherchait à emplir de tout son être ce qu'elle apercevait , ce quelle aimait fugacement , ses passions étaient éphémères et fusionnelles , dune intensité telle quon ne pouvait pas ne pas soupçonner quelque instabilité au fond delle , linstabilité , dans son cas , prenait un visage , celui du désespoir , Lüncha vivait par procuration . Les chants de Khirâ étaient ses seules vérités , ses seuls guides , et souvent , le soir , au creux de la montagne ou cloîtrée dans sa chambre , son refuge loin de tout , son lieu de recueillement entre deux voyages , elle chuchotait de sombres psaumes , à labri sous laile de la lune , elle vivait ses cauchemars , entre deux morts , entre deux larmes .. Sa fuite ne pouvait pas durer éternellement , et au fond d'elle , la haine déferlait régulièrement , difficilement contenue , plus forte , chaque jour .. L'univers de Lüncha s'effondrait , elle le savait , mais les forces lui manquaient , et c'est chaque jour elle se sentait dépérir . Son seul échappatoire était le rêve , elle voyageait énormément , pour entretenir son imagination , pour abreuver ses rêves de nouveaux horizons , pour ne jamais se retrouver seule .
Ce matin là , donc , elle se réveilla plus éthérée , un peu plus immatérielle , un peu moins réelle , la vie séchappait delle , et cétait plus un spectre quune jeune fille qui sarrachait au sommeil ..
Sa journée fut calme , inhabituellement calme , elle resta cloîtrée des heures , errant le long des couloirs , le long des murs ; dans ses mains , une tasse de thé , puis un album de photos , des dessins , des livres , elle voulait se perdre , elle voulait quitter cet endroit , mais nen avait plus le courage , sans but , sans lumière , le soleil paraissait bien pâle .. Le vent se faisait coléreux , tourmentant les champs , sous lil amusé des grands chênes qui entouraient la maison au murs pâles ou se déversait la vie de Lüncha . Ce même vent secouait son âme , car dans son cur , malgré son épuisement physique , saffairaient , se renforçaient ses dernières forces , elle voulait mettre fin à cette indolence épuisée , elle rassemblait les morceaux de cristal éparpillés en elle , brisés par lennui , brisé par une vie trop pesante .. Le vent souffle et porte ses pleurs , loin
Ils volent , planent , se renforcent , et retombent en averse sur la grande citée industrielle de Myckan .
Capitale dEralys , fourmilière grise géante , perdue dans le brouillard , une ville néanmoins belle et digne . Bordée par la mer dOlin , toujours furieuse et impériale , redoutée par tous , et qui venait régulièrement tonner toute sa colère contre les pierres de la « Grande Digue du lys » , uvre sans âge constement perdue dans une brume opaque , percée ça et là par les lumières des installations portuaires . De ce coin de la ville , éternellement mystérieux , craint par les gens de bonne famille et raconté par les marins provenaient deux choses : La forte odeur iodée qui envahissait toutes les artères de la ville , et la réputation de Myckan , une réputation de ville dure , rude , pleine de secrets .. Est-ce vraiment étonnant que cet histoire sattarde et trouve un nouvel élan dans ce chaudron de contes , de superstitions , de craintes pour éloigner les gêneurs et dhistoires pour impressionner les enfants ?
Il pleuvait , les badauds emportés par les vagues se déversaient en flots réguliers dans les cafés du grand boulevard , à la recherche de leur salut , dans de grandes tasses , où simplement assis , devant une cheminée , à parler de lhiver , des contrées éloignées , mystérieuses , sujet de prédilection , car même le plus casanier des résidants pouvait laisser libre cours à son imagination , et conter ses aventures , avec un ton solennel , au point qui lui même se surprenait en simprovisant explorateur ..
Quelques passants avaient choisi de braver les quelques gouttelettes qui humidifiaient les pavés , refusant de compromettre leurs ballades en amoureux , en amis , en solitaire ..
Sur une terrasse lessivée par les eaux , un jeune homme venait de se lever , et rapidement , il entreprit de remonter le boulevard jusqu'à la place principale qui surplombait le reste de la ville , lieu de fête pendant lété , désertique le reste de lannée .. Emmitouflé un épais manteau beige détrempé , Pïncha , car cétait son nom , avançait furtivement , la tête baissée , plus perdu que pressé . Au moment où les pavés cessèrent de se dérouler devant lui , et que le tumulte des cafés sapaisa , il tira dune de ses poches un carnet vert , louvrit nerveusement , puis , au bout de quelques instants , absorbé par la lecture , il changea brusquement dattitude , déchirant rageusement la petite page , la froissa jusqu'à en faire un boule , puis la lança de toutes ses forces , vers lhorizon , loin , hors des murs de Myckan , pour quelle vive , pour quil vive !
Demain , le soleil ne le trouverait plus ici , il sappuya contre un mur , puis glissa doucement , pour tomber assis , la tête dans les bras , sous les arcades de la place , et ses larmes se confondaient avec la pluie
A travers la pluie et la brume , comme un échos aux pleurs , senvolaient les vers de Khirâ :
« Toi mon semblable
Toi que jaime et chéris
Pars , fuis-moi
Les forêts tattendent
Ne demeure pas
Mon temps est passé
Et cette époque se meurt
Les fleurs se taisent
Je sens arriver mon heure
Alors que les vents sapaisent
Ce soir je partirai
Je partirai me battre
Hors du royaume des hommes
Ces vers sont mes adieux
Mes enfants , ne perdez pas espoir
La solution à mes questions
Demeure dans la forêt
Dans le cur de notre Eralys
Sur les flots de rage
De la terrible Olin
Ce soir je partirai
Car mon cur enrage
Soutenez la lumière de nos contrées
Jabandonne , mon combat inachevé
Je vous abandonne
Au creux des forêts je reposerai
Libre , finalement
Je menvolerai
Jusqu'au firmament
Théâtre des étoiles
Où enfin je pleurerai
Bas les masques , plus de voiles
Où , enfant sauvage
Je sentirai lair caresser mon visage
Pour la dernières fois
Ou mes rêves enlacés
Expireront pour purifier
Cette âme tourmentée
A vos côtés je marcherai
Tant que vous garderez
Le souvenir de ces mots
Ma lutte sachève , mais la votre commence
Mon sang coulera dans vos veines
Jai échoué , à présent je ne peux plus
Retrouver despoir nulle part
Sans mentir , sans se leurrer
Plus de questions
Mon existence est vaine
Et je meure de la supporter
Jattendais une lumière , un signe
Pour quitter ma prison
Vie errante , je suis indigne
De goûter à tes eaux
Je partirai au vents
Sans être , libérée
Noubliez pas
Noubliez pas
Je meurs..
Khirâ »
Cette journée avait été peuplée de nuages , de gros nuages noirs ..
Ce paysage n'était plus hospitalier à Lüncha , tout paraissait trop gris , trop terne , trop réel ... Elle n'y avait plus sa place , son horizon était plus stérile encore , ce jour-là ... A la hâte , au soir de cette journée de débâcle , elle rassembla quelques effets qui lui étaient chers , prit un rapide diner , emporta son grand bâton de marche , et se mit en route , laissant reposer la grande maison blanche et triste où son âme s'était posée quelques instants , le temps de sentir la mort devenir plus pesante au fond d'elle , le temps d'entendre un peu plus les craquement de la branche prête à céder , et comme une silhouette perdue dans la nuit , comme Khirâ , elle s'en fut vers d'autres étoiles , vers d'autres contrées .. alors qu'une page de sa vie se tournait , et que les landes d'Ysen se perdaient dans l'horizon torturé ..
Ses yeux ne retenaient que vaguement les teintes des paysages qu'elle traversait , poussée par une force obséssionelle , par un feu qui alimentait sa rage , qui la poussait à avancer , toujours , jusqu'a épuisement , tous les jours , jusqu'a tomber de sommeil , pour enfin trouver asile au pied d'un arbre géant , pour y couler une nuit dont la finalité ne serait que de remplir à nouveau ses membres de force , de toujours plus d'énergie , pour repartir , plus vite , plus loin , décrocher les étoiles , renverser le ciel et la terre , partir et reduire tout ce qu'elle voyait , tout ce qu'elle aimait en cendres .. Les villages qu'elle traversait ne lui ouvraient plus à present leurs portes , comme il est coutume puisqu'Eralys , malgré de forts prejugés sur les vagabonds , était une terre d'asile , une terre hospitalière , mais tentaient de manière soutenue de lui faire comprendre qu'elle n'était la bien venue nulle part , et qu'elle n'avait qu'a aller se faire pendre ailleurs ...
Aucun effet , seule la route comptait , seul l'horizon devait frémir devant la marche de Lüncha , devant cette lumière d'étoile , qui arpentait la Terre en quète de sa propre chute , en quête d'une finalité pour elle même , en réalité , c'était sa vie qui se deroulait à chaque pas , et elle en cherchait frénetiquement la fin , car sa place n'était plus ici .. Ce monde n'était plus le sien , et de la rage pure brûlait en elle , consumant âme et espoirs , à chaque pas , à chaque seconde qui s'écoulait ... Frappant du pied son chemin , elle aperçut , assis sur un muret , un jeune homme au regard perdu , errant , et elle s'arrêta un moment , pour chercher ses yeux , pour chercher à repercuter son regard incisif jusqu'au coeur de ce rêveur ..
Pïncha ...
Par Aerg le 18/6/2002 à 22:32:05 (#1681044)
Par Azulynn Sylrus le 19/6/2002 à 6:15:19 (#1682394)
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