Conte du troubadour: Kolen l'ancien

Par Dodgee MIP le 15/5/2002 à 14:26:47 (#1466683)

Ces sentiments qui nous choquent sont d’autant plus exacerbés, et il n’est de terreur plus grande que celle qui naît de l’ordinaire. Tous nous concevons qu’un démon, qu’un de ces êtres ignobles se livre à mille tortures et se complaise dans le mal, mais quand c’est un des nôtres qui tout à coup s’adonne à pareils sévices, c’est l’incompréhension et la stupeur qui accueillent ses gestes. Et c’est ainsi que la vision des pires tourments sera bien pire venant d’un homme innocent, que venant du plus bestial des bouchers. Le masque de l’innocence demeure le plus sournois, car on ne peut accepter de mêler ainsi l’innocence à l’horreur. Cela, mes amis, fut le credo de Kolen l’ancien, qui dévoua sa vie et son âme au service d’Ogrimar.

Kolen l’ancien ne marqua point l’histoire par ses recherches magiques, mais plutôt par la période de terreur qu’il réussit à instaurer. Loin des puissants sortilèges que maniaient ses confrères, il préférait utiliser de subtiles illusions, et des manipulations viles pour arriver à ses fins. Par tous les moyens, il cherchait à répandre la terreur et la peur, d’où viendrait le chaos. Oh non, pas la peur qu’il pouvait inspirer, car n’importe quel héros aurait pu y mettre fin, mais bien cette peur indicible, sournoise qui demeure même lorsque le soleil semble éclairer la terre. Ces peurs refoulées qui sommeillent en chaque homme, et que l’on tente de faire taire au nom de la raison. Telle était la manière d’agir du sorcier.

Pendant de nombreuses années il parcourut les routes, sous des apparences diverses, aussi anodines que trompeuses. Colporteur, il devenait conteur, puis simple voyageur ou encore rebouteux itinérant. Et partout où il passait-il semait les graines d’un chaos grandissant. Sous ses malédictions, des familles s’entretuaient, le père aimant semblait pris de folie et ravageait sa maison. Ce père que tout le monde appréciait au village, et dont nul ne se serait attendu à pareille violence. Sous ses illusions les miliciens s’en prenaient à tout, à chacun. Eux qui devait faire régner l’ordre se transformant en leur pire ennemi. Sous son impulsion, l’innocente jeune fille qui aidait sa mère à la cuisine se mettait à la poignarder, puis à la découper pour en faire le repas, le plus naturellement du monde. Ah ! Fragile nature humaine, qu’il était aisé pour ce maître de la manipuler.

Bientôt la peur gagna les foyers. Les œillades discrètes étaient bien plus éloquentes des craintes que de longs discours. Ces accès de folie inexpliqués, ces troubles ravageurs attirèrent bien entendu l’attention de mages et autres bien pensant, qui chacun y allèrent de leur explication, jusqu’à ce qu’un puissant sage parvint à déceler la magie qui avait été à l’œuvre. Mais le mal était fait, car pour les gens du commun, la magie si elle pouvait expliquer des choses, demeurait ce contre quoi ils ne pouvaient agir. Leur faire comprendre ce qui s’était passé se révéla déjà ardu, et calmer leurs esprits encore plus. Certains conservaient dans leur cœur cette peur, cette méfiance de la magie, d’autres ne purent, ne voulurent comprendre ce qui avait pu se passer. Et surtout, Kolen était déjà loin, répandant ailleurs, d’une manière ou d’une autre, la terreur et la peur.

On raconte qu’il fut imprudent, qu’il s’attarda de trop pour observer le chaos qu’il avait causé, et que les intrépides aventuriers qui s’étaient lancés à sa recherche finirent par retrouver sa trace. La légende veut qu’il aie ainsi trouver la mort, mais que celle ci ne résolut rien des problèmes qu’il avait causé. D’autres prétendent encore, que son corps ne fut jamais retrouvé, et que les cadavres qui jonchèrent le sol furent ceux des aventuriers qui vinrent le sommer de cesser, et qui s’entretuèrent sous l’emprise du sorcier… Et encore aujourd’hui, la silhouette de la longue pèlerine grise s’appuyant sur son bâton de marche parcourrait les routes…

Par Korben Kissous le 15/5/2002 à 14:36:13 (#1466750)

:lit: Quelle formidable productivité talentueuse, bravo :)