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Je prend ma vie en main...

Par Korey dOrcanie le 17/4/2002 à 14:43:03 (#1299966)

Dydou était toujours parti en terre orcanienne, Antimonar vivait (si on pouvait appeler sa passivité de morte "vivre") toujours sous son toît, et elle ne savait plus quoi faire. Si Loïc semblait s'être replié dans une retraite stratégique, Koreandra savait qu'il pouvait toujours revenir prendre le dessus. Le rituel de MAeslin impliquait la présence de Dydou, elle le savait, mais elle devait attendre. Galeopsys Khaly qui était de retour... Probablement le seul être au monde capable de lui arracher n'importe quelle confidence (mis à part Dydou) et ce sans lever le petit doigt... Cet homme l'intimidait, le dérangeait avec ses paroles doucereuses d'haruspicien. ....Si elle ne faisait rien, un jour elle sombrerait.

Mais elle ne pouvait pas se contenter de cette vie.

Ses enfants l'avaient ému le jour où, revenant habillée d'une longue robe blanche qui couvrait son armure, ils l'avaient regardé un long moment, en admiration devant ce qu'était devenue leur mère: une créature à l'aspect plus doux et chaleureux, qu'on aurait pu plus facilement appeler une "maman" ou une "femme". Gladys s'était même mise à l'esprit qu'elle devait coiffer sa mère. Les coups de brosse, au début, étaient un peu douloureux, car Gladys tirait sans le vouloir les cheveux de sa mère, mais Korey n'en laissa rien paraître, ne voulant pas peiner sa fille. Ses cheveux se retrouvèrent donc coiffés en un tresse malhabile, mais Korey serra ses enfants dans ses bras, les rendant heureux du même coup.

Mais elle ne pouvait pas se contenter de cette vie.

Elle était devenue une aspirante-CDO, accueillie à bras ouverts par Xeros et Moa. Elle se trouvait enfin dans un groupe qui prônait les mêmes idéaux qu'elle, et elle avait l'intention de devenir un excellent éleve. Elle voulait protéger le peuple contre les dangers qui le guette et le ferait. Elle rachèterait ses erreurs passés. Mais pour l'instant...

...elle ne pouvait pas se contenter de cette vie.

Quelque chose n'allait pas et elle savait ce que c'était: elle devait partir à la recherche de cette épée de légende, Statys Galathea, pour sauver son âme des perversions de Loïc. Certes, elle pouvait attendre Dydou... et en même temps, elle ne pouvait plus. Elle sentait que sa vie, comme il y a très longtemps, lui échappait lentement, ne lui appartenait plus. Elle devait faire quelque chose, faire quelque chose pour elle, d'elle même.

"Je suis Koreandra Fortin, je ne suis pas que l'épouse de Dydou d'Orcanie. Je ne suis pas sous ses ordres, nous le savons tous les deux. Je suis une femme forte et indépendente, et c'est maintenant que je dois le prouver."

Elle sursauta quand elle entendit quelqu'un frapper à la porte.

Par Korey dOrcanie le 17/4/2002 à 15:01:38 (#1300086)

Le même ange de vertu était à la porte et attendait en souriant. Décidément, rien n'échappait à Gwendolyne d'Armor. Koreandra la fit entrer et les deux femmes allèrent s'assoir à table. Korey lui expliqua le périple qu'elle avait l'intention d'entreprendre, écoutée avec attention:

"Mon enfant, lui répondit la vieille femme, il était grand temps que tu te décides. Plus tu aurais attendu, et plus difficile ça aurait été pour toi de retrouver la trace de cette épée. D'ailleurs, je soupsonne Loïc de n'attendre que ton départ pour agir.... tu en es consciente, j'espère?
-Oui.
-Bien. Je sais qu'il y a des bateaux qui font parfois la navette de Silversky à Langonie; de là, Usk n'est plus très loin. Puisqu'il s'agit maintenant d'une archipèle (Korey écouta, intriguée par les connaissances de cette ailleule.), tu n'auras qu'à louer les services d'un pêcheur pour qu'il t'y conduise.
-...Mais s'il me dépose sur une des iles d'Usk, il va surement repartir! Comment est-ce que je ferai pour passer d'une ile à une autre, pour chercher sur toutes les iles?
-Tu trouveras un moyen sur place, j'en suis certaine, mon enfant."

Le sourire énigmatique de Gwen chassa ses questions et ses inquiétudes d'un coup. Cette femme restait toujours un mystère à elle seule; heureusement, sa chaleur et son optimisme en font un être qu'on a toujours envie de cotoyer.

Gwen était là, Koreandra savait qu'elle pouvait lui confier les enfants; mais comme elle refusait de partir sans donner de nouvelles, elle écrit deux lettres, une pour Dydou et une autre pour Kreslack Slay. Elle discuta longuement avec ses enfants pour leur expliquer le pourquoi de ce voyage: elle regardait, le coeur serré, les larmes couler sur les joues de ses enfants.

"Je reviendrai très bientôt, c'est promis, mes petits anges... Et promettez-moi de faire bien attention à Antimonar..."

Cette dernière se leva et alla vers la guerrière: restant immobile un instant, le regard vide, elle se jeta dans les bras de Koreandra et pleura de tout son saoûl. Cette marque d'émotion lui serra le coeur un peu plus, et elle se promit de revenir encore plus vite pour ne plus jamais être séparée d'eux.

Elle alla préparer ses choses dans un sac, regardant parfois le soleil dans le ciel, car Gwen l'avait prévenu d'un bateau partirait au crépuscule... Offrant un dernier regard à ses enfants et à leur arrière-grand-mère, Korey envoya la main, puis partit vers le port.

La lettre pour Dydou resta à la maison; un pigeon-voyageur emporterait la lettre de Kreslack jusqu'à la capitainerie...

Par Korey dOrcanie le 17/4/2002 à 15:04:22 (#1300114)

Une lettre pour le Capitaine de la Garde l'attendait...

http://membres.lycos.fr/juliepisces/dOrcanie/lettreKoaKres.jpg

Par Kreslack Slay le 17/4/2002 à 17:11:08 (#1300846)

Il reçut avec plaisir la missivie qu'il lui était adressée, reconaissant du sceau qui lui était attribué, celui de la famille d'Orcanie ..

Aux premiers écrits de celle-ci, il eut du mal à cerner son but, puis à mesure de la lecture, il comprit d'avantage le sens des premiers mots qu'elle usa.

Il espérait de la façon la plus reccueilli qu'il soit que Koreandra allait être amenée à faire de ce voyage, la finalité de son destin, espoir d'une vie meilleure ..

Aux quelques mots qui concluaient la missive, un sourire plus prononcé vint se dessiner à son visage, et il la replia correctement, puis la rangea à part, dans un coin bien réservé.

Si chacune de ces demandes, et autres postulats pouvaient être rédigés d'une si fines écritures et d'un grain de papier, ce moment serait décidemment plus un plaisir qu'une contrainte ..



( Super Korey :) *Poutou* )

Par dydou dOrcanie le 17/4/2002 à 22:47:53 (#1302856)

Avec Dirfung, il était revenu sur les terres de Goldmoon et avait réussi à retrouver Xeros. Malgré le bonheur évident qu'avait un père à retrouver son fils, Xeros ne retint pas Dydou plus qu'il ne le devrait, le laissant courir vers sa famille. C'était avec un pas empressé, réprimant une envie de courir, que Dydou se rendit à la résidence familiale.

Il fut d'abord surpris de ne pas y trouver Korey... mais Gwendolyne, sa grand-mère qui avait tant de fois veillé sur sa famille; puis, une autre surprise l'attendait: la présence d'Antimonar Shis. L'enfant, jadis joyeuse et souriante, avait maintenant l'air le plus malheureux qu'il ait vu de toute sa vie. Que s'était-il passé durant son absence??? Il alla questionner Gwen quand cette dernière lui tendit un parchemin: reconnaissant l'écriture de son épouse, il sut que les réponses à ses interrogations s'y trouvaient.

http://membres.lycos.fr/juliepisces/dOrcanie/lettreKoaDy1.jpg

La chaise sur laquelle il s'assied lui parut soudainement bien venue...

Par Korey dOrcanie le 17/4/2002 à 23:22:24 (#1303000)

Le soleil se retirait dans son lit, emportant avec lui un navire qui voguait vers le large. Longtemps, Koreandra resta sur le pont, à regarder les terres royales disparaître à l'horizon... Des visages aimés défilaient sous ses yeux: son mari, ses enfants, ses amis... Un soupir fut emporté par le vent, et la guerrière dut lutter contre les sanglots qui lui étreignaient le coeur.

"Korey, tu sais que tu es horrible quand tu pleures?"

Ces mots lui virent à l'esprit pour la première fois depuis très longtemps et lui apportèrent un instant un sourire... Son frère, Reynard, lui disait ça quand elle pleurait... et une des dernières fois qu'il avait prononcé ces mots, c'était ...


Le bruit d'une gifle retentissait dans la petite maison de paysans. Koreandra Fortin avait la tête qui tournait tellement la punition était puissante, mais elle ne tomba pas. Devant elle se tenait son père, l'autorité de la famille, celui-là même qui venait de lui infliger cette humiliation. Un peu en retrait se trouvait sa mère qui, les larmes aux yeux, ne faisait pourtant rien pour protéger sa fille. Son frère, elle ne le voyait pas: il était probablement derrière elle.

"Quoi que tu puisses dire, papa, tu ne me feras pas changer d'avis: je partirai et retrouverai Dydou!"

Une autre gifle meurtrit la joue de l'adolescente.

"Il est hors de question que tu me désobéisses. Tu es ma fille: tu feras ce que je déciderai que tu ferais. Et si je dis que tu resteras ici et que Dydou partira avec ses parents, alors c'est ce que tu feras."

A quoi bon débattre sur ce point, après tout? Moins d'une heure avant, elle avait entendu de drôles de bruits provenant de la maison voisine, celle de Dydou; en regardant par la fenêtre de sa chambre, elle vit la famille qui empilait ses maigres possessions sur une charette, profitant ainsi du couvert de la nuit pour s'enfuir. Korey sortit par l'iaccès improvisé et alla les rejoindre en courant. Quand Dydou la vit, il alla à sa rencontre, la serra de toutes ses forces dans ses bras.

"Mes parents disent que nous devons partir, mais refusent de me dire pourquoi. Mais moi, je refuse de vivre sans toi, Ko, et je resterai avec toi, comme nous nous le sommes promis!"

Aussi avaient-ils lutté, l'un dans les bras de l'autre, pour rester unis, pour que jamais on ne les sépare.... Mais rien à faire: des paires de bras avaient brisé leur étreinte mutuelle. On avait même frappé Dydou pour qu'il perde conscience, alors que des bras plus forts retenaient cette furie rousse qui hurlait le nom de son amoureux. Elle se débattait toujours quand la famille de paysans partit en charette, emportant Dydou loin d'elle.... bien loin d'elle... Elle se rappelait vaguement une voix qui lui disait:

"C'est mieux ainsi. Tu verras."

C'étaient ces mots que son père répétait maintenant devant elle, après l'avoir giflé à deux reprises. Pour refuser d'obéir, elle fut même confinée à sa chambre jusqu'à ce qu'elle décide de se montrer raisonnable.... d'oublier... Ca lui prit deux semaines avant qu'elle n'accepte de se calmer quand on prononçait le nom de son ami d'enfance, de son amoureux... Entretemps, son frère était venu la voir une fois: s'asseyant sur le lit contre lequel elle avait le visage obstinément tourné, il lui chuchotta:

"Korey, tu sais que tu es horrible quand tu pleures?"

Pour la peine, Reynard reçut un regard meurtrier (et rouge de larmes) et reçut un oreiller en plein visage. Ce qui réussissait généralement à faire sourire sa petite soeur avait échoué lamentablement et il savait pourquoi. Il soupira:

"Je sais que tu aurais voulu partir avec Dydou, ou rester pour toujours avec lui, mais ça n'était pas possible. ... J'ai espionné une discussion entre nos parents et ceux de Dydou... Ils étaient obligés de partir parce qu'ils sont restés trop longtemps avec nous. Je n'ai pas tout compris, mais je sais qu'il y a quelqu'un qui les cherche, et ce ne serait pas une bonne idée s'il les retrouvait. Je n'en sais pas plus, Korey, mais essaye aussi de comprendre papa! Il croit que si tu pars avec eux, tu seras en danger toi aussi. Les parents de Dydou croient qu'ils sont en danger en restant avec nous. Il n'y a pas d'avenir possible pour vous deux! .... Tu verras, petite Korey, tu oublieras... C'est un premier amour: tu en auras d'autres..."

Sur ce, il avait quitté la pièce. L'avenir prouva que son frère eut tort: aucun garçon n'approcha Koreandra et elle n'oublia jamais Dydou. .... Ce n'est pas tout à fait vrai: elle oublia Dydou le jour où la vengeance fut toute sa vie, le jour où elle eut tout perdu: ses parents, son frère, sa liberté et son honneur...


Comme ils venaient de loin, ces souvenirs... Et surtout, comment avait-elle pu oublier Dydou la première fois qu'elle l'avait croisé? Trop aveuglée par le désir de vengeance, plus aucun souvenir n'avait pu la faire revivre, et il avait fallu que Dydou lui se présente à nouveau devant elle pour qu'une étincelle revienne dans son regard...

La nuit était tombée: mis à part un ciel étoilé, il n'y avait plus rien à voir. Koreandra retourna dans ses quartiers, sachant que le voyage en bateau prendrait quelques jours....

Par dydou dOrcanie le 19/4/2002 à 22:02:43 (#1314214)

D'un pas lourd, il alla vers la chambre qu'il partageait depuis longtemps avec Koreandra... Elle lui manquait déjà. Il aurait voulu la voir l'accueillir avec un de ces baisers qui le faisait toujours chavirer ou avec une casserole, le menaçant joyeusement de l'assommer s'il partait une fois de plus en voyage pour une durée aussi longue... Mais elle n'était pas là.

Sur une chaise près du lit, il remarqua un vêtement blanc, soigneusement. Une robe blanche comme il avait l'habitude d'en porter. ....Mais celle-là avait quelque chose qui le tracassait.

Lentement, il la déplia et l'étendit devant lui, à bout de bras: sa surprise fut si grande qu'il faillit échapper la robe. ...Une robe de femme... La robe de Koreandra.... La robe qu'elle avait toujours refusé de porter... Elle l'avait donc ressorti du placard??? Il entendit un bout de papier effleurer le sol et vit la lettre. Lentement, il se pencha et l'ouvrit:

"Dydou, mon amour...
... celle-là, je la porterai pour toi, pour moi, parce que je t'aime...
Ko"

Doucement, il porta la robe à son nez et en sentit toutes les effluves... Ces odeurs qui lui rappelaient cette femme qui était si chère à son coeur... Il pensa à la robe toute la soirée, même lors que ses enfants accapparaient son attention. Gwendolyne décida de rester un peu plus longtemps, pour épauler Dydou lors qu'il partirait à ses réunions, mais elle savait que l'esprit de son petit-fils était ailleurs.

Quand Dydou retourna à sa chambre pour dormir, il prit avec toute la douceur du monde la robe, l'allongea sur le lit, puis s'allongea à son tour, sous les couvertures, les yeux rivés sur la robe, un sourire rêveur aux lèvres. Il la caressait du bout des doigts comme on caresse le corps d'une vierge qu'on ne veut pas effrayer.

Il resta longuement à regarder cette trace de son épouse et sombra dans un sommeil paisible...

Par Korey dOrcanie le 19/4/2002 à 22:45:20 (#1314509)

Elle retourna à sa cabine et écrivit quelques lignes dans son journal de bord:


Voilà. Deux jours depuis que je suis partie et la terre n'est toujours pas en vue... Dans deux ou trois jours, j'aurai atteint la côte et je pourrai me lancer à l'aventure... J'en ai assez de cette inactivité.

J'ai eu l'occasion, à de nombreuses reprises, de repenser à cette discussion que j'ai eu avec Soren of Sky. Soren... De nombreuses années nous séparaient de la dernière fois que je l'ai vu... Je crois que ce fut le jour où Lighthaven fut attaquée par une horde de kraanians et que, épaulée par Dydou et de plusieurs gardes, j'ai contribué à la repousser... C'était ce jour-là, oui...

Il m'a proposé de réfléchir à mes motivations à vouloir entrer dans l'Ordre de Bréhan... A dire vrai, je ne sais pas si c'est ce que je veux ou non. Visiter l'Ordre m'a appris à mieux les connaître, ce qui remonte mon opinion de ses membres. Ainsi, je n'avais pas affaire à une bande de barbares sanguinaires... Mais en les voyant tous rayonnants dans des armures de plaques alors que ma propre armure faible et usée faisait l'effet d'un tas de ferrailles, j'ai eu un peu honte de l'aspect que j'offrais.

Réfléchir... sur mes motivations... Mon bras sert dans la bataille pour protéger les faibles, pas pour en créer ou décapiter mes ennemis. Je prie Bréhan parce que je suis une guerrière, c'est ma première raison. Je prie Bréhan parce que nous sommes tous les deux des combattants et que, comme moi, il est pour la justice et l'équité dans les combats. Le combat à l'arme de poing. Comme Syl est la déesse des magiciens et Sélène celle des archers. C'est un raisonnement simpliste, mais je ne me vois pas glorifier la magie si je l'ai renié si longtemps. Bréhan est MON dieu et j'en aurai aucun autre.

...Maintenant... Etre dans un Ordre? Mis à part rassembler des gens qui ont des idées similaires, est-ce qu'un ordre a un autre but? Je peux prier Bréhan dans la solitude de ma chambre tout comme je peux le faire dans un temple, entourée d'autres bréhanites... ...J'ignore encore à quoi SERT une guilde: c'est le problème...

Je dois me concentrer sur ma mission. Un moment de distraction peut me faire passer à côté d'un élément important... ou peut me mettre en danger. Je retrouverai cette épée et je serai enfin libre. Attention, Loïc... attention...

Par Korey dOrcanie le 20/4/2002 à 17:09:59 (#1317718)

Le bateau arriva à bon port, sans encombre. Il était temps: le précédent voyage en navire de Koreandra l'avait laissé avec un dégoût de la mer... mais elle savait que, dans les jours qui viendront, elle serait obligée de reprendre le large, ce qui lui faisait monter à coup sur la bile aux lèvres. Du poisson, du poisson et encore du poisson... Elle avait envie de manger du veau pour changer! Et l'eau croupie de la cale n'avait pas aidé à calmer son mal.

Ouf.... enfin un pied à terre... La terre langonienne était belle à cette époque de l'année: des cerisiers déployaient leurs pétales roses sous un ciel azur. Les gens vaquaient à leurs occupations, sans paraître oppressés par un quelconque pouvoir tyrannique... comme sur Orcanie... Koreandra soupira devant leur bonheur évident: tout était si paisible... Mais elle aussi devait trouver son équilibre.

Elle alla voir au port des pêcheurs et chercha quelqu'un qui serait disposé à l'emporter sur les iles d'Usk.

"Ma pauvre p'tite dame, lui dit un vieux pêcheur édenté, aller sur Usk, c'est dangereux! Y a un MOOOOONSTRE qui surveille ces iles-là! Toutes les barques qui y vont se font détruire et ses marins se font avaler d'un seul coup! ...Vous voulez pas aller là-bas, ma p'tite dame.... Naaaan naaaan.... Allez plutôt retrouver votre mari et lui faire de beaux enfants."

Mais il en fallait beaucoup plus pour décourager la "p'tite dame", qui sentait déjà la moutarde lui monter au nez.

"Ecoutez-moi bien, lui dit-elle avec sècheresse, je DOIS aller sur ces iles, monstre ou pas. Je suis prête à payer toute ma fortune pour m'y rendre et, s'il le faut, je tuerai votre monstre en prime. Mais personne ne me fera reculer. Alors soit un de vous accepte mon offre et m'y conduit... soit je paye pour une de vos barques et je m'y rend seule."

Les deux individus se jaugèrent du regard. Elle espèrait qu'il plierait, car elle n'y connaissait strictement rien en navigation. A peine savait-elle ramer convenablement. Mais elle misait sur son air intimidant, son regard enragé et son épée (éternellement ensanglantée par on ne sait quel barbare sanguinaire) pour le faire réfléchir. Il gratta sa barbe d'une main, air songeur, puis dit:

"...Puisque vous insistez... J'connais un seul homme assez fou pour faire la traversée jusqu'à Usk et c'est Urian le Pêcheur... On l'appelle aussi Urian-sans-cervelle. Il vit dans une p'tite cabane, un peu en retrait de la ville. Vous pouvez pas la manquer: elle tombe en ruine! Y a qu'lui pour être assez fou pour y vivre."

Korey paya le pêcheur en guise de remerciement, puis alla à la recherche de cet homme aussi cinglé qu'elle...

Par Korey dOrcanie le 20/4/2002 à 20:47:07 (#1318878)

La maisonnette fut tellement facile à trouver qu'elle se demandait si on ne lui avait pas fait une farce: en effet, elle aurait mieux fait de rester abandonnée! L'herbe folle poussait entre des dalles qui n'avaient pas été remplacées depuis des lustres, conduisant à un assemblage de murs en bois (dont on pouvait sentir la moisissure bien avant de l'apercevoir) qui ne tenaient que grâce à un miracle... La toiture était... inexistante et heureusement qu'il n'y avait pas de porte (ce serait plus rapide pour fuir si jamais la demeure s'écroulait). La guerrière se questionnait encore sur s'il s'agissait une sombre plaisanterie ou non quand elle vit un homme en sortir avec une canne à pêche. ... Encore un vieil édenté... Elle cacha son dégoût quand il tourna la tête vers elle et lui souria.

"Eh ben, une bien belle dam'zelle! Faudrait être fou de croire que c'est pour voir Urian-sans-cervelle qu'elle vient ici!"

Elle respira un peu mieux: non seulement elle s'adressait à la bonne personne, mais en plus il connaissait le surnom que des gens médisants lui soufflaient dans le dos. Peut-être n'était-il pas si fou finalement...

"Messire Urian, j'ai besoin d'aide et on me dit que vous êtes le seul à pouvoir y arriver.
-Aaah? (Le vieil homme semblait surpris.)
-Oui. On m'a dit que vous étiez le seul assez... brave pour vous rendre jusqu'aux iles d'Usk.
-Ah, les vieilles terres d'Usk..., dit-il en souriant. C'est vrai que je suis le seul à oser approcher Uyokan.
-Uyo....?
-Le puissant serpent de mer! Nous sommes de vieux amis... Il me fait confiance.
-...A vous... et à personne d'autre?
-Oh, si les autres pêcheurs faisaient attention et lui donnaient un peu de poisson à l'occasion, il ne serait pas aussi méchant avec eux. Il est gros, mais c'est une bien gentille bête."

Une nouvelle fois, la guerrière eut l'impression d'être tombée sur un fou... ou peut-être que le serpent n'était qu'une rumeur? Un mauvais concours de circonstances, un navire qui se frappe contre des récifs ou des bancs de coraux.... Peut-être...

"Seriez-vous capable de m'amener sur ces terres? Ce que j'ai à y faire est très important. ....S'il le faut, je payerai vos services."

Le vieil homme la regardit de haut en bas, réfléchit un instant, tourna en rond, ne se départissant jamais de son air concentré. Korey mourrait d'envie de le presser, mais, non... patience... patience.... Le pêcheur réfléchissait toujours devant elle, puis la regardit, tout sourire et lui dit:

"Gardez votre bourse, dam'zelle, ça ne sera pas nécessaire..."

Ils se présentèrent mutuellement, Koreandra rassurée, Urian heureux d'avoir une nouvelle compagnie, même temporaire. Ensemble, ils allèrent au canot et ramèrent ensemble.

La mer était tranquille... tranquille.... trop tranquille........

Par Korey dOrcanie le 21/4/2002 à 18:48:10 (#1323161)

D'un côté, une côte déjà indistincte; de l'autre côté, des iles à peine visibles. Le vieil homme ramait en chantant des airs que seul un marin pouvait connaître, des chansons grivoises pour la plupart, et la guerrière accélérait légèrement la cadence, dans l'espoir d'être débarrassée rapidement de cette torture. Elle imaginait ce pauvre homme à la merci d'un Ogrimarien à qui il infligeait le même tourment... Le pauvre homme... Vivre sans langue. C'était une épreuve de patience, mais surtout de tolérance, ce qui était encore plus difficile.

Les iles approchaient de plus en plus, des goélands venaient voltiger au dessus de leurs têtes, quémandant le poisson qu'ils n'avaient pas dans leur barque. Mais la houle devint de plus en plus forte, les vagues de plus en plus hautes, comme bousculées par un puissant courant sous-marin.

"Ah, ça, c'est Uyokan!"

Il eut droit au regard terrifié de la guerrière; avant qu'elle ait eu le temps de lui demander si tout irait bien, quelque chose d'immense sortit brusquement hors de l'eau, sauta dans les airs, puis replongea. Caché derrière la vague qu'il avait créé, Uyokan était resté dissimulé aux regards indiscrets. La barque fut repoussée bien loin, à moitié remplie d'eau. Koreandra prit rapidement un contenant en fer et vida l'embarcation de son eau.

"Ohla! Il n'est pas de bonne humeur aujourd'hui! J'comprend pas ce qui lui prend! D'habetude, il....."

Un autre geyser apparut non loin d'eux, mais ne manqua pas sa cible cette fois. La barque vola en éclats avec violence, éjectant du même coup la guerrière et le pêcheur. Ils retombèrent lourdement dans l'eau.

Alourdie par son armure d'anneaux, Koreandra coulait à pic malgré ses efforts pour se maintenir à la surface. Elle battait des bras frénétiquement, essayant de garder son souffle le plus rapidement possible. Ses yeux exhorbités regardaient la silhouette noire agrippée à un bout de bois au-dessus de sa tête, encâdrée par une eau claire. Son corps fatigait sous les efforts déployés, mais rien ne le ramenait à la surface. Lentement, l'air quitta ses poumons et ses yeux se refermèrent.

La dernière chose qu'elle fit avant de perdre conscience fut cette bouche énorme dirigée vers elle....

pom pom

Par Jolkien Elfenuit le 21/4/2002 à 19:24:42 (#1323391)

((:lit: Franchement je vous dis Bravo j'aimerai bien savoir ecrire comme sa !!!! :lit: ))

Par Korey dOrcanie le 22/4/2002 à 18:33:13 (#1328463)

Le bruit des vagues.... le sable chaud d'une berge.... le cri d'un oiseau qui s'envole haut dans le ciel... une légère brise sur sa joue... une main pleine de douceur qui déplaçait ses cheveux derrière son oreille..... une main?...

Doucement, elle ouvrit les yeux: elle était sauve, allongée sur le ventre, une joue contre le sable rude. Une ombre s'était allongée sur son visage et quand elle leva les yeux, elle vit difficilement les traits d'une vieille femme qui lui souriait avec tendresse. Pour peu, elle aurait cru que c'était Gwendolyne... mais non... celle-là était bien différente...

"Vous l'avez échappé belle, jeune fille... (...Une voix comme de la soie...) Vous avez eu la chance que peu ont eu avant vous..."

Elle voulait lui dire quelque chose, la remercier, mais elle avait avalé tellement d'eau salée qu'elle le recracha en toussant, incapable de placer un seul mot. ...Comme elle était épuisée...

"Il ne faut pas vous inquiéter pour le pêcheur qui était avec vous: il est très débrouillard et doit surement être de retour chez lui maintenant. (Le regard de Koreandra semblait encourager la vieille femme à en dire plus: ) Ici, rien demeure ignoré bien longtemps: je crois même connaître le but de votre quête. ... Vous cherchez la Chasseresse de Fantasmagories..."

Souriant devant l'air stupéfait de la jeune femme, elle poursuivit:

"Statys Galathea, la Chasseresse de Fantasmagories... Ne soyez pas si surprise: les seuls étrangers qui viennent par ici viennent tous pour cette épée de légende, mais tous sont revenus les mains vides. Il ne suffit pas d'avoir trouvé l'épée pour pousséder son pouvoir; il faut aussi avoir fait ses preuves..."

Les deux femmes se levèrent, Koreandra soutenue par la vieille inconnue. Plus loin, elles retrouvèrent le bouclier et l'épée de Koreandra: ce dernier item attira la désapprobation de la vieille dame.

"Celui qui possède une épée éternellement tachée du sang de ses adversaires doit avoir une âme des plus impures et mériterait la damnation éternelle pour expier ses fautes. (la voix de Koreandra était toujours enrouée: )
-Quand je l'ai eu, elle avait déjà cette teinte. J'ai eu beau frotter et frotter, mais aucun de mes efforts y changeait quoi que ce soit.
-C'est parce que vous avez ce goût du sang dans la bouche. C'est un goût qui ne disparaît qu'avec la mort... ou un miracle...
-Et pourtant... j'essaie....."

D'un pas lent, elles se rendirent vers un petit village. Une puissante joie de vivre et une incomparable sensation de paix envahit la guerrière, qui ferma les yeux pour humer l'air, un sourire paisible aux lèvres. D'un coup, on venait de lui faire oublier le serpent de mer, son beau-père ou ses larmes versées par le passé.

Les gens étaient accueillants, très ouverts, et se saluaient tous au passage: certains même saluaient la guerrière avec chaleur. Kaya, la vielle dame, conduisit Koreandra jusqu'à une chaumière, probablement sa demeure.

Un cours d'histoire eut lieu, en apprenant davantage à la jeune fille que tous les manuels réunis. Oui, elle avait bien trouvé Usk, ce qui restait d'un pays détruit par une irruption volcanique. Les puissants tremblements de terre avaient divisés le pays à de nombreux endroits: beaucoup de parties sombrèrent, mais quelques iles subsistèrent après cette catastrophe. Cet archipèle est restée depuis longtemps abandonnée et oubliée jusqu'à ce que des pêcheurs aventureux décident de l'explorer et de s'y établir. L'endroit est resté sous la protection constante des Cinq Maîtres des Illusions d'Usk: on ignore comment ils ont survécu aux catastrophes ou s'ils n'ont pas transmis leur titre à d'autres personnes, mais on sait que le nombre de participants dans l'organisation s'élève toujours au nombre de cinq et que ça ne changera jamais. On ignore qui ils sont, personne ne peut se vanter d'avoir vu leur visage, mais on sait que ce sont eux qui ont invoqués les gardiens des îles.

"Gardiens?
- (Kaya ria aux éclats: ) Vous ne croyez quand même pas que toutes les personnes à la recherche de la Chasseresse sont venus par bateau, comme vous! Le serpent de mer n'en est qu'un, un sur une dizaine! Comme des plaisantins de magiciens s'amusent toujours à faire le voyage en astral, il y a aussi quelques gardiens dans ce plan dimensionel!"

La confusion de Korey devait être évidente: après tout, elle était une paladine, certes, mais elle n'y connaissait strictement rien au monde astral! ... Probablement que Dydou aurait été d'une bonne aide pour avoir des explications à ce sujet... mais étrangement, elle préférait rester loin de ce monde..... astral... plan dimensionel... Qu'est-ce que c'était que toutes ces histoires? La vieille femme n'insista pas sur le sujet:

"...Désirez-vous toujours entreprendre cette quête? Je vous préviens que d'autres ont essayé avant vous...
-Oui, je dois le faire.
-Qu'est-ce qui vous y oblige? (Koreandra lui expliqua son problème avec son beau-père, qui empirait de jour en jour: ) Rien ne vous oblige de partir à la recherche de l'épée, bien au contraire! Vous pouvez laisser ce magicien... comment l'appelez-vous... MAeslin? faire ce rituel qui séparerait vos deux esprits et vous seriez enfin libre!
-...Je pourrais, c'est vrai.... Le problème, c'est que j'aurais toujours ce sentiment d'inachevé, d'incompétence... L... L'impression de n'avoir jamais réussi à me défendre contre mon pire ennemi en ce monde, la source de tous mes maux. Je dois le vaincre seule si je veux enfin être heureuse. Pour vous, c'est peut-être de l'orgueil: pour moi, c'est une étape que je dois franchir si je ne veux pas toute ma vie me sentir dépendante des autres ou inapte à protéger ceux que j'aime."

Le regard de la vieille femme ne la lâcha pas un seul instant, semblant même sonder le regard émeraude de la guerrière pour lire dans son âme, puis lui dit:

"Soit. Alors vous devrez vous conformer à certains caprices des Maîtres."

Elle dut se départir de son armure d'anneaux et porter des vêtements en toile (un pantalon bleu foncé, une ample chemise blanche et de petites bottines de cuir) : c'était, lui avait-on dit, pour montrer qu'elle n'avait rien à cacher et qu'elle accepterait toutes les épreuves qui se dresseraient devant elle. Elle dut aussi se départir de son bouclier. Elle avait droit à son épée uniquement. Elle noua autour de sa tête un bandeau de couleur vive qu'elle avait dissimulé sur elle, souvenir d'une amie qui se faisait surement beaucoup de soucis pour elle... Une dernière caresse à son alliance, une pensée douce pour Dydou, et elle fut prête à partir.

Par Korey dOrcanie le 25/4/2002 à 19:24:38 (#1345580)

Elles quittèrent la chaumière et suivèrent un chemin dans le village, et au milieu de celui-ci se tenait une immense statue: elle la reconnaissait bien, il s'agissait du sauveur de Windhowl et de son épée. Elle reconnaissait dans ses traits tout le sérieux du guerrier, une vigilance que personne ne pouvait distraire, et surtout la tristesse du solitaire... un regard si familier dans sa douleur. ....Mais maintenant qu'elle pouvait contempler la statue à la lueur du jour et dans tous ses détails, elle remarqua que la main qui tenait l'épée était tatouée... 5 runes, aussi étranges que celtiques...

La vieille dame brisa sa contemplation en lui parlant de l'homme, lui rappelant l'histoire qu'elle avait lu sur le parchemin, mais cette fois avec plus de détails. L'histoire de deux amis d'enfance séparés par le temps, mais aussi par une frayeur villageoise: la peur de la sorcellerie et de tout ce qui touche la magie. Un accusait l'autre de ne pas prendre sa défense, l'autre n'y pouvait rien, même s'il l'aurait voulu. Une rage, une haine décuplée par la noirceur du coeur. Une ambition grandissante et n'ayant pour limite que celle de la folie, limite rapidement franchie. Des villes détruites, des peuples souffrants... Et l'opposition forcée des deux amis, maintenant ennemis, à savoir ce qui vaincra entre la liberté ou le chaos....

"Celui qui aura cette épée devra mener le même combat, dit la vieille femme. La Chasseresse de Fantasmagories ne se donne pas, elle se mérite. Celui qui la convoite ne touchera que le brouillard; celui qui cherche la liberté pourra peut-être la trouver, mais il devra montrer ce qu'il sait faire."

Koreandra était devant elle et regardait toujours la statue.

"Cet homme a du beaucoup souffrir pour l'obtenir...
-Et il a souffert davantage en portant un coup fatal à son ennemi... car il fut également son ami.
-Pourquoi a-t-il confié l'épée aux Maîtres de l'Illusion?
-Parce qu'il n'en avait plus l'utilité. Parce qu'il avait pu vaincre ce qu'il y avait à vaincre. Il n'avait pas à chercher plus loin une nouvelle raison de s'en servir: ce qu'il avait à accomplir avec Statys Galathea a été accompli.
-Hmm... (long silence, puis se retourne pour parler en face à la dame: ) ...Donc, si je ..... hmmm?"

La vieille Kaya avait disparu et le village derrière elle était devenu un bois sombre; quand elle regardit à nouveau en direction de la statue, elle ne vit que des arbres qui s'étendaient jusqu'à la limite de sa visibilité. Elle n'était plus dans le village maritime; elle était maintenant dans une clairière à peine dégagée. ....Mais comment.....?

Elle décida, légèrement tracassée, de ne pas se poser de questions. Son épreuve venait de commencer.

Par Korey dOrcanie le 28/4/2002 à 19:07:31 (#1364500)

Elle avançait au hazard, ne sachant pas où chaque pas la conduirait. Peut-être dans la bonne direction, peut-être dans une embûche... Mais elle finit par se dire qu'aucune direction était mauvaise si on l'encerclait d'un bois qui n'existait pas quelques instants auparavant... Elle avançait avec méfiance, mais elle savait qu'où elle irait, son épreuve l'attendait.

Les bois se resserraient autour d'elle au fil des minutes... ...cinq... dix.... vingt.... trente... Vérité ou illusion? Réalité ou fantasme? A qui demander? Le seul point clair à ses yeux était qu'elle était devenue l'esclave du bon vouloir d'illusionnistes absents. Ils voulaient des preuves, ils en auraient... Mais en ce moment, l'endroit semblait désert de toute vie, vierge de tout malheur. Tout juste si on ne l'avait pas oublié.

Une heure s'écoula: un bruit se fit entendre entre les arbres, sur sa gauche. Rapidement, elle prépara son arme.

Par Korey dOrcanie le 10/5/2002 à 16:28:40 (#1436605)

Tenant son épée à deux mains, elle attendait nerveusement la créature qui faisait ce tapage, qui fendait les broussailles à une vitesse folle. Elle entendit un hénissement, puis vit une magnifique bête rousse se précipiter hors des buissons, courant dans la clairière où elle avait maintenant les pieds. En voyant la guerrière, le cheval se cabra, rua en hénissant toujours, puis prit une autre direction en courant. Le calme retomba un instant...

...Les branches l'avertirent qu'il y avait une autre présence. ...Pas qu'une.. plusieurs... petits, mais agiles... et ils approchaient... L'instant suivant, elle vit des petites créatures, une quinzaine, à l'aspect ressemblant à des gobelins, mais pas tout à fait... Ils chargeaient maintenant vers elle, bondissant à des hauteurs incroyables, poussant des cris perçants. Se remettant rapidement de sa surprise, elle se mit à les attaquer les uns après les autres... et quels adversaires redoutables! S'ils n'étaient pas très puissants, ils étaient très rapides et difficiles à toucher. Et leurs griffes lacéraient la peau de la guerrière avec l'efficacité de dagues. Au bout d'une demi-heure, la guerrière haletante regardait autour d'elle les cadavres de ses adversaires, abandonnés par les quelques créatures restantes qui avaient pris la fuite.

Elle s'éloigna de quelques pas du tas de cadavres: peut-être y avait-il des fauves dans cette forêt... Alors l'odeur du sang les attirerait inévitablement. Mais d'abord, elle devait s'occuper de ces blessures. Demandant à Brehan un peu de son pouvoir, elle guérit ses plaies, ne gardant comme souvenir de la lutte que des marques rouges qui s'estomperaient avec le temps.

Elle entendit un bruit doux derrière elle; en se retournant, elle vit le cheval qui la regardait. Une magnifique bête rousse, dont la robe était lacérée. Pauvre créature... Elle n'avait jamais été très "nature", mais elle avait toujours détesté les gens qui s'en prennent à plus faibles qu'eux, et les chevaux sont souvent mal traités sur Goldmoon...

"Je ne peux pas laisser le cheval comme ça..."

Elle fit quelques pas en direction du cheval, qui recula immédiatement, craignant un nouveau danger; Koreandra arrêta. Avant de pouvoir soigner l'animal, elle devait l'apprivoiser... Ah, que n'aurait-elle pas donné pour avoir un quelque chose de druide, pour une fois, juste pour cette fois? Dès qu'ils voient un animal en détresse, ils sautent dessus pour le protéger et l'animal ne se sauve pas, se laisse faire... Peut-être connaissaient-ils un ... un dialecte pour parler aux chevaux, leur faire comprendre qu'ils n'ont pas de mauvaises intentions....

"Grrr... Je ne suis pas druidesse avec des fleurs dans les cheveux, je suis Brehanite avec une grosse épée. Il faudra faire avec!"

Elle fouilla dans son sac: n'y avait-elle pas quelques provisions? Hmm... potion... potion... potion... sang de gobelin... potion... beurk, un vieux parchemin qui a pris l'eau et qui est dorénavant inutilisable... ah! une pomme. Lentement, elle posa son sac sur le sol, exposant la pomme au regard de la jument (elle n'y connaissait rien, mais dans son esprit, le sexe de l'animal ne faisait aucun doute). Reniflant l'air, l'animal semblait intéressé, mais gardait toujours ses distances. Koreandra connaissait ce sentiment: vouloir faire confiance, mais trop souffrir pour en être capable...

Elle sortit son épée de son fourreau, la seule lame à sa disposition; le cheval prit peur et recula un peu plus. Mais le cheval ne s'attendait surement pas à voir la bipède couper la pomme en deux pour ranger sa lame dans son fourreau... L'odeur n'en était que plus claire, sucrée, et son aspect était fort alléchant...

La jument avança brusquement vers Koreandra et se mit à ruer, sans la toucher. Impressionnée, la guerrière recula d'un pas, tenant toujours les deux moitiés de pomme. La bête voulait tout pour elle, croyant qu'il n'y aurait pas de partage... Aucun compromis possible, voulait dire sa ruade, cette pomme sera à moi, même si je dois te tuer pour l'avoir. Pourtant, la guerrière resta là, sans se défendre, sans faire de geste offensif. Après quelques ruades douloureuses, la jument arrêta de se rebiffer et se mit à regarder son adversaire.

Femme et jument se regardèrent longuement dans les yeux. C'était comme s'ils se sondaient le coeur mutuellement. Un lien invisible se tissait entre elles, un lien de confiance et de compréhension. Finalement, la guerrière tendit un morceau de pomme à la jument: elle le regardit, le renifla, hésita, puis l'avala. Il en fut de même pour l'autre moitié. Une main alla vers un museau, qui recula, hésitant, puis parvint à toucher son poil chaud. Elles avaient encore à se connaître et encore le temps pour le faire...

A force de calins et de caresses, Korey parvint à soigner les plaies de l'animal, ressentant une forte tristesse à la pensée que leurs routes, à peine croisées, devaient déjà se séparer... Elle avait une quête à mener et la jument avait surement une vie... Quand elle voulut s'en écarter, la jument la suivit, la regardant de ses yeux bruns et tendres. Quand elle fit demi-tour pour repartir, le coeur lourd, elle entendit un hénissement de reproche dans son dos et vit la jument revenir à sa hauteur.

"Tu ne vas pas laisser ton équipière derrière toi! Je veillerai à ce que tu ne m'oublies pas, toi!", semblait dire le regard du cheval.

Finalement, les deux partirent ensemble dans une direction aléatoire, riant ensemble cette rencontre fortuite, mais réconfortante dans un monde chaotique...

Par Korey dOrcanie le 18/5/2002 à 0:13:04 (#1482614)

Quelques jours s'écoulèrent, quelques jours où la jument et la guerrière apprirent à mieux se connaître. Elles avaient appris les divers signes de leur camarade annonçant un désir quelconque. ...Elles en venaient même à se taquiner mutuellement, rigolant avec ce nouveau compagnon qu'ils avaient trouvé alors qu'ils étaient seuls et sauvages...

Il arriva à quelques reprises que d'autres créatures sautillantes se dressèrent sur leur chemin; alors, elles commencèrent à dresser des habitudes de combat. Ces habitudes amenèrent Koreandra à apprendre l'équitation, avec l'aide de sa monture. Si ce fut dur les premiers temps, si Korey monta la jument avec raideur et la crainte de tomber, elle finit par se dégourdir et prendre confiance, s'agrippant à la crinière du cheval pour conserver son équilibre. Elle eut du mal à se servir de son arme tout en allant sur Braise (le nom qu'elle avait donné à sa compagne), mais elle avait l'intention d'apprendre.

Ainsi se tourna une autre page de l'aventure...

Par Korey dOrcanie le 6/6/2002 à 19:43:47 (#1604602)

Les pas appellent les chemins, comme un désir appelle une aventure. Quand les sœurs se levèrent une nouvelle fois pour affronter cette autre journée, elles savaient déjà qu’elles ne croiseraient pas toujours un chemin fait en pétales de roses, qu’un jour elles commenceraient à en sentir les épines.

Une intuition les poussait à une vigilance plus poussée qu’à l’accoutumée. La végétation perdait lentement son feuillage et son éclat. La terre, auparavant ferme, devenait boueuse au fil de leur marche. Une légère brume à peine perceptible s’étirait dans ces bois où la grisaille dominait.

La nervosité de Braise s’accentuait, sentiment partagé par Koreandra, assise sur le dos de la jument. Il y avait… quelque chose dans l’air… une tension pesant sur leurs épaules comme un fardeau.

Malgré ce poids sur son cœur, la guerrière laissa son esprit vagabonder. Elle repensait au village de son enfance et à la sévérité dont son père avait fait preuve tout au long de son enfance disciplinée. Le souvenir de sa mère revenait également, la revoyant parfois les bras tenant un panier contenant des vêtements séchés au soleil, parfois les serrant, son frère et elle. …Son frère…. Celui-là même qui s’amusait à la mettre hors d’elle… Elle se rappelait encore les bagarres qui suivaient, les nez cassés, les bras tuméfié. Que de bons souvenirs… Puis, il y avait eu Dydou… Dydou et sa flûte, Dydou et les années passées, Dydou l’ami, Dydou l’amoureux… Plus tard, beaucoup après avoir été arraché l’un de l’autre, il était devenu son frère, puis son mari… Et leurs enfants… leurs enfants… Se lassait-elle un seul instant à penser à leurs frimousses moqueuses, aux verres brisés, aux œufs brouillés où trônaient encore des morceaux de coquille ? Non, on n’y arrive jamais…

Un hennissement tremblant la tira de ses rêveries : le pas de Braise était de plus en plus lent et pourtant, quand la guerrière se pencha pour regarder, il n’y avait rien pour gêner sa démarche, que de la boue qui s’enroulait au tour des chevilles de l’animal, sans plus… En se redressant, donnant quelques petites tapes d’encouragement à son cheval, elle vit quelque chose qu’elle n’avait pas remarqué plus tôt : le décor était entièrement changé. Tout n’était que boue et brume épaisse. Les quelques arbres qu’elle arrivait à voir étaient rabougris et sans vie. Des sons, il n’y en avait aucun, aucun signe de vie, même pas le bourdonnement d’une mouche pour venir rompre ce silence.

Un décor triste à mourir.

Par MAeslin le 6/6/2002 à 23:26:33 (#1605697)

(:lit: :cool: :amour: )

(enfin la suite :) )

Par Korey dOrcanie le 10/6/2002 à 10:43:28 (#1626319)

...Silence mortuaire...
...Décor mortuaire...
...Fantasmes mortuaires...

Une atmosphère d'une désolation telle qu'on se demandait comment la vie pouvait y survivre... mais néammoins, l'équipée continuait sa marche, parcelle de vie dans un monde qui n'en espérait plus. On aurait pu croire qu'une bête assoupié avait été réveillée par peur présence et que ce sang nouveau était un rappel à sa faim.

Créature sanguinaire, quelle soif caches-tu en ton flanc? Quel appétit dévore tes entrailles?

La brûme resserrait son étau sous ce silence de pierre...

Roulez, cailloux, roulez que l'on vous sente. Ma fin est-elle si proche que vous deviez me tourmenter davantage? Même le ciel opaque ne m'offre qucun réconfort. Le néant est la plus sadique prison. Qu'on m'en sorte.... Qu'on m'en sorte!

On répondit à sa prière sous la forme d'une silhouette drapée par la brûme, imprécise et immobile. ... Une autre ame qui vive? Elle semblait humaine, cette forme inespérée.... Une longue masse souple volait au vent, ses cheveux peut-être... Elle ne semblait pas hostile, peut-être seulement aussi esseulée que les deux voyageuse. L'appeler? L'inviter?

Braise frissonnait entre les cuisses de la guerrière: elle lui montra clairement sa désapprobation quand Koreandra lui donna des petits coups de talon dans l'espoir qu'elle se dirigerait vers la silhouette, mais alla en direction inverse en hennissant. La guerrière n'insista pas, songeuse. La forme se dissipa.

La progression se poursuivit et l'air n'avait rien perdu de sa lourdeur. Il avait même gagné en humidité, rendant pénible la respiration. Par peur ou par suffocation, choisissez votre mort...

Elles n'eurent pas à attendre très longtemps: une voix s'éleva au coeur de la brûme. ... Un homme chantait... Un air guerrier... Les paroles lui revenaient lentement, et la voix, souvenir oublié, résonnait en écho dans son esprit.

"....Papa?"

Elle l'avait appelé à voix haute, malgré elle. Comment son père pouvait-il être ici? C'était impossible! La jument se câbra légèrement et rappela la guerrière à la raison. Oui, son imagination lui jouait des tours...

"Koreandra? C'est toi, mon brin de coriande?"

Brin de coriande... Il n'y avait que lui pour l'appeler ainsi... Le cheval, une nouvelle fois, s'agita et hennit: la guerrière retrouva à nouveau ses esprits. ...Non... Son père était mort: inutile d'espérer un miracle. On se jouait d'elle.

"Koreandra? Où es-tu? Viens et nous rattraperons le temps perdu..."

Même si sa cavalière n'avait esquivé aucun mouvement, prononcé aucune parole, le cheval s'agita, puis tourna la tête en faisant claquer ses dents. Le message était clair: "descend de mon dos et je te mords". Elle caressa l'encolure du cheval pour le rassurer, et elles s'éloignèrent de cette voix masculine qui avait pourtant bercé la jeunesse de Koreandra. Pour toute parole, un soupir quitta ses lèvres. "Je suis sur Usk, après tout...", se dit-elle. "C'est normal qu'on vienne me torturer à coup de souvenirs... Je ne dois pas céder."

C'était une épreuve de volonté que la guerrière s'imposait, heureusement épaulée par la jument. D'un endroit, puis d'un autre du marécage lui venaient des voix ou des apparitions, des gens qui voulaient l'approcher ou la voir approcher, des situations qui, si elle ne s'était pas promis de rester cheval, l'auraient fait intervenir. Elle manqua de se laisser aller à une pulsion d'urgence quand une vision de son village qui brûlait, de chevaliers en noir le ravageant et de sa famille qui implorait son aide se profila sous ses yeux. Son coeur se comprima douloureusement quand elle s'éloigna de cette vision, entendant les cris de détresse, se rappelant ce jour maudit... Mais toujours elle évitait le contact, elle évitait ce que ces illusions désiraient.

Bête sombre, tais ta faim, car je ne serai pas ton plat de résistance. Ma chair ne remplira pas ton estomac et mon sang n'appaisera pas ton gosier asséché.

Par Joi Ubdi le 11/6/2002 à 0:30:15 (#1631464)

(:lit: :lit: :lit: :amour: :amour: )

Par MAeslin le 11/6/2002 à 6:11:59 (#1632441)

*apprécie toujours autant la qualité littéraire du RP Orcanien*

:lit: :amour:

Par Korey dOrcanie le 11/6/2002 à 13:00:40 (#1634308)

N’y a-t-il donc pas de répit pour les âmes qui souffrent, même en silence ? Toujours est-il que Koreandra eut une nouvelle vision et, malgré son cheval qui la suppliait de ses hennissements, malgré sa propre raison qui volait maintenant en éclats, elle ne put y résister.

…Dydou… et une femme ?

L’image était, à l’instar de celles qui l’avaient précédé, très claire, à quelques pas seulement de l’équipée. Certes, il lui tournait le dos, mais elle reconnaissait parfaitement sa silhouette longue et mince, ses épaules droites et ses cheveux châtains d’une coupe impeccable. Il portait une de ces robes blanches qui faisant sa signature. Quand il tourna la tête vers son épouse et lui sourit, enlaçant toujours cette « autre », elle en perdit le souffle pendant quelques instants. Le cheval avait beau se cabrer, l’appeler avec puissance, il n’arriva pas à détacher son amie de sa fatale transe, car, oui, Dydou se trouvait bien devant elle…

…Et pourquoi enlaçait-il une autre femme qu’elle? Dydou ne lui avait jamais été infidèle, ça elle le savait… Il revenait bien tous les soirs après ses rapports et son travail. Il lui montrait toujours avec la même passion son amour pour elle. Ses yeux brillaient avec ce même éclat de leur premier amour. Alors pourquoi cette vision qui n’avait pas lieu d’être ?

Parce que le passé est un grand félon et qu’il verse à l’oreille qui craint ses poisons et ses chimères. Avant même qu’un amour ne naisse entre eux, Koreandra avait vu, au fil des années, de nombreuses femmes se balader au bras de celui qui deviendrait son mari. Belles et pleines de grâce, polies et chaleureuses, mais surtout aimantes, ces femmes, Koreandra les avait regardé de loin, sujets d’une muette dérision ou d’une silencieuse fascination. Craignant toujours dans le plus grand des secrets que l’amour de Dydou à son égard ne s’efface comme se sont effacés ceux qui l’ont précédés, elle avait vécu un jour à la fois, chérissant chaque moment partagé avec son mari, maudissant le temps gaspillé. Mais il était là, la regardant, lui souriant presque innocemment, et parla enfin :

« Ko, tu es enfin là ! Comme tu as disparu depuis si longtemps, je me suis trouvé une nouvelle compagne. »

Si longtemps ?! Combien de temps s’était écoulé depuis son départ ? Une semaine ? Deux ? …Longtemps ? Sur ce, il se déplaça légèrement vers la gauche, dévoilant le visage de cette voleuse : c’était une femme menue avec de longs cheveux noirs… Mais quelle merveille ! Elle était de loin la plus belle femme à avoir capturé le cœur de Dydou et, même si Koreandra avait toujours jugé la beauté comme quelque chose de superficiel et d’inutile, elle en ressentait quand même une pointe de jalousie envers cette trop parfaite rivale.

Mais ceci n’était-il pas qu’une vulgaire illusion, comme tout le reste ? Elle tenta bien sur de remettre ses idées en place : Dydou devait s’occuper des enfants, faire son travail de diplomate royal, discuter avec les Dragons et ce n’était pas tout… Il ne pouvait décemment pas être ICI ! Et il n’aurait pas la lâcheté… l’hypocrisie de….

Mais le voilà qui enlace à nouveau cette femme qui, après avoir adressé un sourire sadiquement victorieux à l’épouse détrônée, passa ses doigts dans la chevelure châtaine de Dydou avant d’unir leurs lèvres.

Le cœur arraché, n’écoutant plus que sa douleur, Koreandra sauta prestement en bas de sa monture et fit les premiers pas vers le couple. Une paire de mâchoires enserra son épaule, celle de Braise, mais la guerrière se défit de la prise. Elle sentit ensuite une nouvelle attaque, une prise dans ses longs cheveux cette fois. Koreandra se débattit douloureusement, son regard humide rivé sur le couple qui s’enlaçait et s’embrassait presque sauvagement, la main au pommeau de son épée, prête à détruire cette pécheresse…

La jument relâcha sa prise et Koreandra ne sut pas pourquoi… pas encore…

Les quelques enjambées restantes furent rapidement franchies. L’arme toujours dans son fourreau, la main libre de Koreandra s’abattit sur la frêle épaule de son époux et le fit pivoter; mais horrifiée par ce qu’elle vit, elle recula de quelques pas et prit son épée de sang au poing.

Ce qu’étreignait encore Dydou n’était plus la femme idyllique qu’elle avait vu, mais un cadavre en putréfaction. Des cheveux il n’y avait plus ; à la place, il n’y avait qu’un crâne dont la peau grise pelait à de nombreux endroits ou dévoilait un os rongé par le temps. Ses dents étaient pourries et noires… noires comme une nuit sans lune… noires comme ces orbites dépourvus d'oeil, rivés vers elle. Ses vêtements étaient en lambeaux, une haleine putride se répandait dans l’air, et pourtant Dydou ne relâcha pas un instant la créature. C’était une voix autoritaire, dure, teintée de panique, qui s’éleva enfin :

« Dydou, éloigne-toi de ce….
-Non, Korey. Tu ne lui toucheras pas.
-Ce monstre, Dydou ! C’est un monstre !
-Ko… Je l’aime, et personne ne se glissera entre nous, même pas toi. »

Sur ce, il lui fit entièrement face, se mettant entre le cadavre et l’épouse ; la créature passa un bras autour de la taille de l’homme, caressant ses cheveux soyeux de ses doigts osseux. Le choc fut grand, mais Korey en fut tirée en entendant le hennissement de panique de Braise. Se retournant, elle vit son cheval se démenant contre des bras squelettiques et griffus qui sortaient du sol pour l’attraper. Les griffes faisaient déjà leur travail et le sang coulait déjà sur les flancs de la jument. Mais Koreandra fut à nouveau attirée par un son, le cri de douleur de Dydou : la créature lui avait avidement mordu le cou jusqu’au sang. Malgré cette blessure, Dydou n’esquiva aucun geste pour se délivrer : il restait là, souriant, immobile… un pantin.

Un mari inconscient et un cheval impuissant, et elle devait faire un geste. Un geste, oui, mais lequel ? Elle ne pouvait pas laisser mourir son mari, aussi pécheur soit-il… Elle l’aimait ! Peut-être était-il tout simplement sous l’emprise d’un sortilège duquel il ne serait délivré que lorsqu’elle tuerait la bête… Mais son cheval, Braise… Après cette longue traversée, ces épreuves, cette amitié, oui, au nom de cette amitié profonde, ne méritait-elle pas qu’on l’aide, maintenant qu’elle était en danger ? Tout ça par sa faute… Sa faute à elle, Koreandra d’Orcanie… Choix impossible, semblait-il… Ces quelques secondes de réflexion parurent interminables, mais elle en vint à une décision : elle se tourna prestement vers Dydou, l’épée en main.

Le cadavre le tenait fermement et le bouclier accomplissait bien son devoir, ce qui rendait celui de Koreandra encore plus pénible. Elle tenta de multiples feintes, mais sans parvenir à percer la défense adverse. Chaque coup rencontrait le corps de Dydou si elle n’arrêtait pas son élan à temps... Un moyen efficace de tuer cette bête aurait été de viser le cœur ou de trancher la tête ; mais Dydou était si au cadavre, il subirait une blessure équivalente, sinon pire. Il fallait se rendre à l’évidence : si elle voulait tuer la créature, elle devait également tuer Dydou. La robe de Dydou était entièrement teinte de vermeille, mais il la regardait toujours avec ce sourire innocent. Se résoudre à le tuer ? Qui serait capable de tuer la personne qu’il chérit le plus en ce monde ?

Les hennissements derrière elle se faisaient plus faibles : elle ne pouvait plus attendre. Une pensée lui vint à l’esprit :

« Tout ceci n’est qu’illusion et fantasmagorie. »

S’armant avec amertume de cette pensée, elle serra plus fort l’épée dans son poing, puis chargea. Le cadavre mit Dydou entre eux ; l’épée de Koreandra alla se planter dans leurs deux cœurs. Trois cris de douleur s’élevèrent dans la nuit. La créature rageait ; Dydou souriait ; Korey pleurait. Elle retira son épée des deux corps qui tenaient toujours debout.

« Je t’aime, Ko…
-Je ne t’aime pas... Tu n’es pas Dydou. »

La lame fendit la brume et trancha la chair. Deux têtes tombèrent en silence. Amertume… Dégoût… Lentement, les deux corps se transformèrent en boue et glissèrent comme de la cire fondue sur le sol, sans un mot, sans un geste. Ce n’était pas Dydou… mais une lame s’était également fichée dans le cœur de la guerrière alors qu’elle regardait les conséquences de son geste.

Un bruit derrière elle… Elle se retourna… Braise était allongée dans la boue, sur le côté, respirant difficilement, saignant de toute part. Les bras griffus avaient disparu, ne laissant derrière eux que les traces de la bataille. Koreandra avança vers le cheval et se laissa choir à genoux près de sa tête. Elle avança une main tremblante et caressa la tête de sa monture… Qu’avait-elle fait ? A cause d’elle, Braise était gravement blessée… Allait-elle mourir ? Fallait-il qu’elle meure à cause de la bêtise de sa cavalière ? On… ne pouvait pas ! Personne n’avait le droit de faire une chose pareille !!! Ses larmes étaient plus réalistes que ses pensées : ses larmes savaient.

La mort n’est qu’une foutaise… Ca ne devrait pas exister…

« Braise… Braise, je te sauverai… Je…. Je ne te laisserai pas partir. Tout était ma faute…. Si seulement… si…. »

D’un coup sans force de son museau, frottant difficilement sa tête contre la main de la guerrière, elle semblait lui faire ses adieux… Incapable de sauver un cheval… Incapable de sauver… Incapable… Une prière brillait dans les pupilles de Braise : elle lui demandait quelque chose… quelque chose comme…

« Ah non ! Je ne le ferai pas ! Hors de question ! Je te sauverai : hors de question que tu meures. »

Mais Braise la regardait toujours avec cette prière. Koreandra pouvait l’entendre se ficher dans sa tête, puis rebondir contre les parois, gagnant en écho, en force, en ampleur. Cette pensée ne quitta pas son esprit, c’était cacophonique ! Elle mit ses mains sur ses oreilles, secouant rageusement la tête, ses paupières closes retenant un fleuve. Elle ne pouvait pas… Hors de question qu’elle abandonne !

Un hennissement vint la rejoindre dans sa confusion : elle ouvrit les yeux et vit son cheval allongé dans la boue. Ses plaies pustulaient déjà et la guerrière n’avait rien pour guérir la jument rousse. La fin était proche. Le cheval ne pouvait pas continuer le voyage : si elle laissait Braise ici, elle pouvait survivre… un jour… peut-être deux… La souffrance serait insupportable… Dans les mêmes conditions, n’aurait-elle pas demandé la mort ? Braise la regardait avec confiance ; Koreandra lui rendit son regard. Elles n’avaient pas besoin de mot pour se comprendre : elles savaient.

Par amitié…

Elle s’agenouilla comme un chevalier s’agenouille devant son roi, les yeux rivés sur ceux de la jument.

…par amitié pour toi, Braise…

Elle prit son épée, la regarda, sourire amer. La teinte ensanglantée s’y trouvait toujours, malgré la boue. Combien de vies ont été inutilement gaspillées par la faute du tyran qui en eut la possession ? Combien de vies furent libérées grâce à cette lame affûtée ?

…parce que je t’aime, mon amie…

Elle plaça le tranchant de la lame contre le cou du cheval, visant soigneusement, puis leva l’arme à deux mains. La pointe ne capta pas les rayons du soleil : elle semblait au contraire se perdre dans la brume.

…je n’ai d’autre choix…

Un dernier regard pour Braise…. Elle l’encourageait du regard… « Vas-y… N’aie pas peur…. »

…que de te laisser partir, mon amie.

La lame s’abattit, sectionnant le cou en deux. Il n’eut plus un son, même pas un hennissement, même pas un souffle. Le regard de Braise prenait un air… de paix. A la demande de cette chère amie, Koreandra avait abrégé ses souffrances… Elle avait l’impression d’avoir tué, assassiné. Mais qu’aurait-elle pu faire d’autre ? Rien. Lâchant la garde de son épée comme si elle était brûlante, elle posa la main sur les paupières de Braise et ferma ses yeux.

Adieu, Braise… Adieu, mon amie…

Par Illemm le 14/6/2002 à 11:59:19 (#1653774)

( hmmm encore!!!! :lit:

Korey... enfin je m'en lasserai pas... )

Par AngelineAubefeu le 16/6/2002 à 3:34:15 (#1664339)

(en général je ne fais pas de commentaires hrp sous un texte rp mais là je ne voulais pas qu'il disparaisse dans les méandres du forum sans être lu :p )

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