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Retour à Trandling - 68ème partie
Par Galadorn le 15/10/2002 Ã 22:57:12 (#2342539)
Le sorcier que le serveur avait cherché pendant des années était quelque part dans ces cavernes.
Limish était toujours en vie.
Pire encore, il était à l'origine du réveil des morts et de la guerre qui dévastait ces contrées. Afin de récupérer une partie de ses pouvoirs, il allait absorber la substance vitale de son prisonnier, qui était le dernier lien avec son passé, le dernier réceptacle de sa sorcellerie impie.
De quelque manière, Galadorn avait toujours pensé que cela finirait ainsi. Depuis que le nécromancien avait arrêté son choix sur les Rêveurs, sa vie ne lui appartenait plus vraiment. Son sommeil avait été hanté par des visions grotesques, des hallucinations morbides, des phantasmagories sanglantes qui se mélangeaient dans son esprit comme la terre se mêlait à l'eau, obscurcissant son jugement et ses sentiments. Ses peurs avaient pris substance dans le réel, son coeur avait battu la chamade au moindre courant d'air. Aspirer à des journées paisibles était devenu un leurre qu'il avait poursuivi comme l'enfant court après son ombre, sans jamais la rattraper mais sans y renoncer non plus.
Le jeune homme avait connu un long répit lorsque Limish disparut. L'infection était pourtant restée, comme une sourde menace endormie au fond de son être. Pour s'en débarasser, il s'était résolu à se renseigner sur son auteur et à confronter sa malédiction... Il était parti étudier dans les bibliothèques et les tours de magie, à la recherche du moindre renseignement sur le sorcier. Il avait exploré les catacombes royales de Raven's Dust, qui avaient été le repaire de Limish des centaines d'années auparavant. Il était allé sur l'île maudite de Stoneheim, en quête de l'Oracle et de réponses à ses interrogations... La porte du Coeur du Destin était restée close, et ses questions étaient demeurées orphelines.
Deux ans plus tard, alors que lui-même avait abandonné tout espoir, sans le savoir son ami Zeed Mithror le jetait dans la gueule du loup...
Le parchemin de translocation avait fonctionné correctement. Il s'était retrouvé dans ce qu'il pensait être le Labyrinthe d'Obscurité, au delà duquel se trouvait la Porte des Morts. Comme l'avait pensé le paladin, la nuit perpétuelle n'avait pas été un obstacle pour lui, et il s'était déplacé avec aisance dans l'immense réseau de couloirs et de salles cyclopéennes. Muni de tablettes de cire sur lesquelles il gravait son chemin au moyen d'un stylet, il avait parcouru l'édifice de long en large, tentant d'identifier le portail tout en cartographiant les lieux. Il avait imaginé qu'au même endroit il pourrait mettre la main sur la gemme qui en controlait l'accès.
Il avait ensuite réfléchi à la fuite, au parchemin de rappel qu'il lui suffirait de déchirer pour déclencher le sortilège qui le ramènerait en sécurité auprès des siens. Rien ne s'était passé comme prévu.
Ces cavernes avaient été travaillées bien avant la fondation de la cité forteresse, et la magie qui en imprégnaient les murs étaient ancienne et puissante. Ses batisseurs avaient enchanté les lieux pour en bannir toute clarté, et un millier de soleils n'auraient pu éclairer les pas de Galadorn avancant dans le dédale de granite, alors que les astres auraient fait fondre la pierre et transformé la montagne en un magma bouillonant. S'ils avaient pu fermer la Porte, les fondateurs de Trandling l'auraient fait. Malgré leur sagesse, ils n'avaient su ni détruire le portail ni en dissiper les ensorcellements. Les ténèbres régnaient sans partage sous la froide passe, et les Gardiens de la cité décidèrent d'en sceller l'accès.
L'absence de lumière ne signifiait cependant pas l'absence de vie. La sorgue éternelle abritaient de minuscules habitants, vivant et grouillant dans les interstices de la gigantesque structure. Aveugles, ils s'étaient adaptés à la vie souterraine et composaient une pyramide alimentaire étrange, au sommet de laquelle ne se trouvait aucun carnivore. Les mousses, les spores et les champignons constituaient la base de toute nourriture, aussi bien pour les mille pattes à pinces que les rats albinos, et quelques nécrophages et vermines charognardes venaient compléter ce cycle singulier des profondeurs. Leur unique prédateur était apparu récemment: un homme, un naufragé, un mendiant de la peur et du désespoir. De nombreux mois auparavant, abandonnant ses compagnons, il avait échappé aux entités de cauchemar et condamné ses amis à une mort abominable.
Avec eux, il s'était introduit dans le labyrinthe à la poursuite de celui qui avait brisé les sceaux d'Artherk. Un Cercle Sacré des Neuf, avait pensé le père supérieur, viendrait à bout du renégat Kerdshain. Le grand prêtre ignorait alors que les morts s'étaient relevés, et qu'une puissance plus grande que celle des moines-guerriers sommeillait dans les entrailles de la montagne, en attendant de régénérer ses blessures. La pierre de tristesse avait réouvert la Porte. Les dévoreurs d'âmes en avaient franchi le seuil. De chasseurs, les frères étaient devenus les proies, et l'embuscade avait tourné au carnage.
L'unique survivant s'était nourri des myriades de rongeurs et d'insectes dont regorgeaient les grottes malsaines. Le peu de raison qui lui était resté après la bataille s'était effiloché au fil des semaines, pour ne plus laisser qu'un désir primitif de survie. Redevenu un animal, l'aura qui le rendait si visible au sein des ombres s'était éteinte avec son équilibre mental.
Dans l'obscurité, Galadorn ne savait pas qui avait trouvé l'autre, et qui les créatures traquaient. Tandis qu'il parcourait les longs couloirs sous la forteresse, les bruits d'une course l'avait amené à se dissimuler, posté légèrement en retrait de la voie principale. Hulullements aigus, cuir et métal frottant contre la pierre, odeurs souillées, il n'avait pas pu identifier les poursuivants qui étaient passé près de lui. Il avait cependant repéré l'homme qui se tenait recroquevillé sous un surplomb de la roche, et qui l'observait.
Il avait senti le regard de l'autre peser sur lui, tout comme l'angoisse qui suintait de tous les pores de son corps. Sa puanteur sauvage n'était pas déplacée dans ces lieux sordides, et était en partie masquée par les odeurs astringentes des mousses qui couvraient les murs. Puisqu'il s'était dissimulé, le serveur avait rapidement supposé qu'ils n'étaient pas ennemis, et avait esquissé un sourire. L'homme avait il un moyen de le voir malgré l'enchantement? Etaient ils en dehors du labyrinthe? Tandis que Galadorn se posait ces questions, les bruits de la poursuite avaient disparu dans le lointain et son observateur s'était rapproché, rassuré ou intrigué par cet autre intrus.
Galadorn n'avait qu'une vague idée de la nature des gardiens de la Porte, mais la personne qui se tenait devant lui était aussi proche de la représentation qu'il s'en faisait qu'un putois pouvait passer pour un ours brun. L'homme devait faire sa taille, et portait des vêtements malodorants. Tendant la main pour le toucher, il rencontra des pièces d'armure et des restes de maille rouillée, par dessus des vêtements crasseux. L'individu se laissait faire, et semblait le contempler avec autant de curiosité que lui en témoignait à son égard, tout en reniflant l'air de temps en temps, à la manière d'un chien inquiet.
"- Qui êtes vous, messire?" chuchota le jeune homme. Il n'eut pour toute réponse qu'un faible grognement. "Je me nomme Galadorn. Savez vous où nous sommes?" Quelques secondes s'écoulèrent avant que son interlocuteur n'émette un petit rire sec qui aurait pu passer pour un autre grondement. "Je cherche... une porte. Une grande porte d'où jailliraient des gémissements. Pouvez m'aider?"
Puis le serveur se rendit compte que ce qu'il avait pris pour les exclamations de l'homme provenait en réalité d'un petit animal perché sur son épaule.
"- La... Porte des Morts... est... ouverte." Les mots lui venaient avec difficulté, écorchés par sa voix cassée.
"- Oui, c'est de celle là dont je parle. Pouvez vous me conduire à elle? Pouvez vous vous orienter dans le labyrinthe?"
"- Le... talisman... me guide." Comme le vagabond cherchait à saisir son bras, Galadorn le lui tendit, et lui présenta sa main. Cette dernière se referma sur un objet porté en médaillon, lisse et ovale, à la surface agréablement tiède. "Talisman... et Wobbi." A la mention de son nom, la créature émit un ronronnement.
Alors qu'il effleurait le bijou, l'aveugle sentit un faible picotement, puis une image prit forme dans son esprit, aux proportions et à la perspective décalée. Sous la surprise, il vacilla. Alors que le lémurien se précipitait le long du bras de son hôte pour venir lécher ses doigts, la vision devint un tronc immense au bout duquel cinq branches se dressaient, une main de géant ouverte au centre de laquelle une flamme pulsait. Il sentait les contours plus qu'il ne voyait les détails, et sa bouche s'ouvrait à intervalles réguliers, poussant des cris inaudibles. Galadorn comprit que les sens de l'animal se confondaient avec les siens et que sa perception englobait une représentation spatiale que son cerveau tentait de traduire en une vision imparfaite. Lorsqu'il abandonna la gemme, à nouveau les ténèbres se refermèrent sur lui.
"Wobbi... se déplace dans l'obscurité. Je... vois par... son intermédiaire." Le serveur déglutit, et acquiesca.
"- Qui êtes vous?"
"- Je suis... J'ai... oublié." Ces paroles poussées dans un long soupir tombèrent comme autant de fragments de souvenirs trop douloureux.
Par Alanis Lyn le 16/10/2002 Ã 3:31:37 (#2343392)
Par Dodgee MIP le 16/10/2002 Ã 9:10:52 (#2343850)
Allez on se dépèche, dernière édition! Demandez votre exemplaire!
Par Zeed Mithror le 16/10/2002 Ã 18:27:31 (#2347451)
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