Bienvenue sur JeuxOnLine - MMO, MMORPG et MOBA !
Les sites de JeuxOnLine...
 

Panneau de contrôle

Recherche | Retour aux forums

JOL Archives

Théâtre de l'Absurde (Entrée en Scène)

Par Azulynn Kissous le 17/3/2002 à 14:09:03 (#1128782)

La plaine s'étire à l'infini sur le ciel embrasé du soleil couchant. Mille et mille points noirs ou blancs envahissent l'émeraude ombrée de la nature. Mille et mille faisant courir un sourd grondement dans le calme du crépuscule. Les rares oiseaux encore présents dans le ciel s'éloignent à tire-d'aile. Deux marées humaines pour un no man's land fragile entre elles... L'atmosphère est lourde, irrespirable, ce calme tiendra-t-il longtemps, qui tend à se rompre à tout instant ? Les chevaux de part et d'autre piaffent, les lourdes armures résonnent dès qu'un mouvement les anime, les hommes disparaissent derrière leurs casques, et sans discerner leurs visages on devine l'énervement, les relents de peur et de courage défaillant à la vue des Autres... Iront-ils ? Cherchent-ils dans leurs esprits perdus les motivations qui les amènent ici ? Ne pensent-ils pas qu'après tout cette guerre n'est pas la leur ? Il est trop tard. L'engeance guerrière est en marche, entraînant dans son sillage les spectres de tant de morts inutiles. Il est trop tard. La Faucheuse va venir dans la pire de ses injustices. Il est trop tard.
Il est trop tard.

Descendons voir ces jouets, tiens. Le camp de gauche quand on vient de la forêt sombre, ou de droite lorsque les montagnes s'étendent derrière vous. Peu importe. Le miroir de son adversaire de cette nuit, ce miroir poli et parfait dans lequel les combattants n'oseront jamais se regarder. Un drapeau teinté de grisâtre claque au vent qui se lève à peine, des stratèges discutent à l'infini cartes déployées et positions marquées, un haut gradé décoré de médailles goûte les mets exquis emportés de la ville en baillant, songeant peut-être à ce triomphe organisé en ville qu'il a dû rater, soupirant, un oeil las sur les troupes rassemblées. Et celles-ci ? Les armes se polissent, de derrière leurs casques on entend s'élever des discussions futiles et autres blagues grivoises pour dissimuler l'horreur. L'un fanfaronne sur ses hypothétiques exploits passés. Mais après tout, il ne restera peut-être personne pour vérifier la véracité des dires, au lever du jour ? Alors on laisse parler, on veut y croire, on veut croire que le lendemain encore l'on pourra hautement considérer ces bêtises.
On veut y croire.

Approchons encore un peu, tiens sur cet homme, là. Le casque à la main, un visage rude marqué de sillons de fatigue, de douleur. De cette peur. Peur panique, peur sanguine, peur incontrôlable. Songe-t-il à une femme, un enfant, des parents laissés derrière lui, dans une petite maison doucement illuminé des flammes rougeoyantes de la sécurité cette nuit-là, peut-être ? Un médaillon tendrement attaché à son cou et caché derrière le fer froid de son armure en témoignerait douloureusement. Les yeux d'une noirceur incommensurable sont perdus dans le lointain. Oublier, oublier ce semblant de guerre qui va tout détruire. Oublier parce que ça n'a pas de sens.
Aucun sens.

Alors on va jouer, aujourd'hui. On va sortir les marionnettes de leurs poussiéreux cartons, avec des mains maladroites. Installer un décor aux couleurs criardes, placer les jolies petites poupées. Les marionettistes s'entreregarderont, dans un sourire cynique, une voix indifférente retentira. Ouvrez le feu. Les armures grinceront, une cavalcade retentira, les deux faces du miroir se précipiteront jusqu'à l'onde de choc. Contact. Le reflet d'une lame glaciale. Cherchez la faille dans l'armure. Les maîtres de tout cet absurde s'activent. Seulement il n'y a pas d'artefact pour la douleur. C'est du sang qui coule, du sang, vous m'entendez ?! Ils sont sourds. Les jouets tombent, mais dommage, ils ne sont pas réparables.

Sur une autre scène... L'arc impuissant d'un dos accablé, deux yeux de velours dévorés par les flammes qu'ils reflètent, des mains crispés sur un bout de tissu. Elle sait. Il ne reviendra pas. Ils n'ont pas été les jouets les plus perfectionnés ce soir.

Une âme s'envole.

Un cri rauque monte vers la voûte céleste.

Les lourds rideaux se referment.


Revenons dans une autre nuit tachées d'encre. Deux yeux de chat émeraude s'ouvrent brusquement. La Lune s'éloigne, bientôt le jour reprendra ses droits... Mais avant l'aube quelques vies étincellent déjà. Celle-ci repousse calmement les draps immaculés, avant de s'habiller puis s'enrouler dans une cape sombre dissimulant les reflets pourpres de son vêtement. Elle a trop longtemps attendu. Trop de lunes qu'elle est seule, se complaisant dans le rôle du cristal fragile. Assez. Elle veut savoir.

Les premiers voyageurs purent sentir une fragrance délicatement féminine, à l'aube, sur les routes serpentant en-dehors des murailles de la capitale...




http://membres.lycos.fr/arwen15/azulynn10.jpg

Par Kyriane Feals le 17/3/2002 à 14:22:25 (#1128846)

:lit: :eek:

On ne peut rien ajouter à ce récit... si fantastique qu'il se suffit à lui-même...

Par Hôte des Kissous le 17/3/2002 à 14:44:28 (#1128944)

:lit: :eek: :eek: :eek:

*en profite pour kissouter sa momon au passage*

Par Pico Thy le 17/3/2002 à 16:14:40 (#1129381)

Un très beau texte qui a du sens, lui :)
:lit:

Seulement il n'y a pas d'artefact pour la douleur.

Par Deux âmes de Feyd le 17/3/2002 à 16:42:03 (#1129559)

Juste des totems.



http://131.111.108.111/Norway/Monolith.jpg



Ils n'ont pas été les jouets les plus perfectionnés ce soir.


Une âme s'envole.

Par Azulynn Kissous le 17/3/2002 à 19:28:38 (#1130672)

Que la gravité est donc forte ce soir... Et merci à ceux ayant répondu... ;)

Par Gengis Khan le 17/3/2002 à 19:37:15 (#1130729)

Charmant...

*Sourit*

Par Bardiel Kissous le 17/3/2002 à 21:49:29 (#1131477)

Et paf le post que j'adore... Azuuuuuuuuuu j't'adooreuhhhhhhh :amour:

Par Azulynn Kissous le 18/3/2002 à 12:39:35 (#1133139)

:(

Par Chrysaor Osten le 18/3/2002 à 13:00:14 (#1133209)

c'est émouvant, plein de sens, agréable à lire... Tu abordes un thème difficile avec maturité et philosophie sans tomber dans le grotesque ou le banal... bravo que dire de plus ;)

Par Azulynn Kissous le 18/3/2002 à 18:22:50 (#1134575)

Allez savoir pourquoi j'insiste... ;)

Par Meth le 18/3/2002 à 21:09:23 (#1135614)

:lit: toujours abasourdi devant tant de grâce à l'écriture

Par Alith Anar le 18/3/2002 à 22:07:58 (#1135918)

Que dansent les pantins
Leurs fils sont si ténus
Sur la musique de leur propre fin
Ils s'engagent sur des chemins perdus

Les marionnettes s'agitent
Et jouant leur drame à l'infini
Ignorant de ceux qui leur imposent ce rite
Composent leur propre tragedie

Que dansent les pantins
Leurs fils sont si ténus
Sur la musique de leur propre fin
Ils figureront parmi ceux qui ne sont pas revenus

La gloire survit à la chair...

Par MortifeR le 18/3/2002 à 22:41:10 (#1136111)

Le vieux fossoyeur mâchouillait lentement l'extrémité d'un brin d'herbe... elle était si verte sur les tombes.
Tout à coup, il se raidit, se dressa d'un geste vigoureux, et empoigna sa pelle. Il avait entendu une mélodie que lui seul pouvait percevoir, dans ce lieu où régnait un silence macabre.
Le langoureux adagio de la toute dernière plainte, un râle de défi final, noyé dans l’écho tonitruant d’une gloire immortelle.
Et il entreprit de cultiver encore son jardin...

Bientôt, il aurait de nouveaux invités, des légions entières.

Par Maver|ck le 21/3/2002 à 21:18:37 (#1151242)

J'l'avais loupé !!!
Up !!
J'adore :) :) :)

:amour: ;)

Par Yolinne MIP le 21/3/2002 à 22:12:55 (#1151668)

Etait-ce donc le dernier acte de cette pièce sinistre ? ou pourra t'on espérer acclamer le tragédiste pour d'autres scènes ?

JOL Archives 1.0.1
@ JOL / JeuxOnLine