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Une naissance

Par Kalder'Shee le 12/12/2001 à 14:54:13 (#536591)

"Des linges propres et de l’eau bouillante !"

Le cri impératif se répercuta une demi-douzaine de fois avant qu’une femme ne vînt, les bras chargés d’un drap blanc et d’une bassine fumante. Elle se fraya un passage entre les spadassins en armure qui encombraient le couloir pour enfin parvenir, après avoir franchi une lourde porte d’ébène, à une chambre luxueuse au centre de laquelle trônait un lit somptueux à baldaquins noir de jais finement sculptés. L’on entendait, de derrière les tentures, des gémissements et de puissants soupirs. La jeune porteuse, en les écartant, fut saisie par le spectacle de sa Baronne, souffrant et soufflant, le visage rougi par un effort quasi draconique, dont elle ignorait jusqu’à présent qu’elle en fût capable.

Elle crut un instant avoir, dans sa sidération, lâché son fardeau, mais elle se rendit vite compte que la sage-femme l’en avait dépossédé, et s’en servait déjà pour distiller son art auprès de sa maîtresse.

"Ferme cette porte, et reviens m’assister !" ordonna la sage-femme, de la même voix, calme et qui pourtant forçait l'obéissance.

La jeune servante cligna des yeux, semblant reprendre ses esprits, et s’avança vers la porte béante, d’où des soldats médusés aux couleurs de Laek’Na’Tyl observaient la scène.

Un grondement sourd, suivi d’un crissement métallique lointain fit tourner quelques têtes, et provoqua l’inquiétude de quelques hommes d’armes, qui s’en furent. La jeune femme prit la porte, et la ferma doucement. Elle avait presque achevé sa tâche quand un gantelet métallique apparut dans l'entrebaillement, et vint arrêter sa progression. La porte se rouvrit, en grand, poussé par un homme de puissante stature, revêtu d’une rutilante armure ciselée et articulée. Son visage farouche, malgré le camail annelé qui le recouvrait à moitié, exprimait une colère contenue. Il s’avança dans la salle, sans même jeter un regard sur celle qui lui avait fermé la porte au nez, et vint s’asseoir au chevet de la femme qui reposait sur la couche. Sa voix sombre emplit toute la salle, et pourtant il était évident que ces mots ne s'adressaient qu'à la femme accouchant.

"N'aurais-tu pu attendre encore ? L'ennemi est à nos portes, et tu nous interdis toute retraite."

Il n'eut pour réponse que des soufflements rauques, et un regard dardant qui aurait percé n'importe quel humain normal. Mais le Baron Kurgen de Laek'Na'Tyl était d'une autre trempe... Il n'en tint même pas compte.

"Je vais devoir à nouveau composer sans avoir d'autres solutions que le triomphe ou la mort. Kcehtra nous vienne en aide, nous aurons besoin de lui..."

Il se leva brusquement, et sans même un regard de compassion envers sa femme luttant, il tourna les talons et s'en fut dans un cliquetis d'armure huilée. La porte claqua, le silence sembla revenir un instant, puis fut rompu par un gémissement crispé. Le travail continuait...

Partie 2

Par Kalder'Shee le 12/12/2001 à 15:13:03 (#536710)

La servante revint au chevet de sa Baronne, et aida tant qu'elle put. Au-dehors, la nuit arrivait à son terme, dans moins d'une heure il faudrait compter avec la lumère de ce soleil rougeoyant et agonisant. Et cet enfant qui ne voulait pas venir... La clameur qui s'éleva en un crescendo sans limite sonna comme un prélude à la bataille imminente. La jeune femme courut vers la fenêtre, pour contempler la scène du drame qui s'annonçait.

Dans l'enceinte, une colonie fourmillante de soldats à la livrée bleue, couleur de Laek'Na'Tyl, s'organisait aux cris des officiers. Des rangées d'archers s'alignaient sur les créneaux, arc en main, flèche encochée. Toute cette vie semblait réglée comme un orchestre, dont le chef n'était autre que le puissant Baron, gesticulant et vociférant, dispensant ses ordres comme des imprécations au milieu de la foule vigilante de ceux qui allaient mourir. Les officiers, prenant le relais des ordres, mettaient en place leurs escouades selon la stratégie choisie, avec un calme et une résignation qui forçait le respect, au vu de ce qu'ils allaient devoir combattre...

Au-dehors, des rangs serrés de guerriers en arme menaçaient l'horizon, toutes piques dehors et étendards dressés. Des estafettes montées sur des créatures bondissantes à deux pattes faisaient la liaison entre les unités, preuve ultime de l'organisation de l'armée qui allait s'abattre sur la forteresse. Des instruments à vent et de puissants tambours, installés sur d'immenses chariots, réglaient la marche funèbre de la défaite imminente des troupes de Laek'Na'Tyl, le doute n'était plus permis. Un ordre bref fusa, le sifflement acéré des flèches creva l'espace, et un nuage de dards mortels partit s'abattre sur les troupes au-dehors. Le jeu de la mort avait commencé, le métal de Laek'Na'Tyl venait de faire à nouveau connaissance avec la chair.

"Ferme cette fenêtre, servante ! Par Kcehtra, Le soleil va se lever !" Vociféra par-dessus le brouhaha la sage-femme, toujours à l'oeuvre. Avec un pincement au coeur, la jeune femme ferma les volets, puis tira les rideaux. Ne restait plus comme lumière que celle des bougies éparses. Elle s'approcha, et fit tout son possible pour aider, même si cela se résumait finalement à saisir la main de sa Baronne et la bercer de paroles rassurantes, sans tenir compte ni de la sueur perlante sur le front de la sage-femme, ni du sang qui maculait et les mains et les linges...

A quelques reprises, la jeune femme sursauta. Claquements menaçants de flèches de plantant dans quelque pièce de bois proche, projectile venant s'abattre sur la tour, résonnance étrange des instruments de guerre qui ne cessaient de vomir leur cacophonie bancale... Et soupir de douleur de sa maitresse, dont l'état ne cessait d'empirer malgré les manipulations expertes de celle qui savait mettre au monde, seule isolée parmi ceux qui ne savent que tuer. Elle avait à présent ses avant-bras couverts d'écarlate, et sa robe était maculée. Le linge n'avait plus ren de propre, et malgré tout l'enfant n'était pas né.

La sage-femme lança soudain un regard dur à sa jeune assistante. On y lisait la colère, la détermination, la résignation...

En attendant la suite...

Par Averoes Landis le 13/12/2001 à 10:03:07 (#541556)

:lit:

De meme

Par Quisalas le 13/12/2001 à 15:48:59 (#543342)

:lit:

Partie 3

Par Kalder'Shee le 13/12/2001 à 17:51:57 (#544185)

Elle ouvrit sa besace, et en sortit un fin couteau, dont la lame venait d'être affutée, au vu des rayures scintillantes que la meule y avait laissé. La poitrine de la servante se serra, avec la même force que la main de la Baronne. Un moment flotta, entre deux battements de coeur, et un message intuitif passa entre les trois femmes présentes. Elles se remirent alors ensemble au travail, avec la même détermination. Seules quelques larmes écrasées vinrent altérer leurs sentiments.

La lame n'avait pas encore fait son office qu'un rugissement éclata juste derrière la porte d'ébène. Un choc métallique suivit, ainsi qu'un hurlement de victoire. Puis, la porte céda, et Kurgen, son armure recouverte d'un liquide vermillon, entra toutes armes dehors. Deux cadavres fumants gisaient au sol, juste aux pieds de la porte, et dans le couloir la bataille faisait déjà rage. Tel un assassin surpris en action, la sage-femme munie de son couteau toisa l'homme qui venait perturber son travail. Une expression farouche marquait chaque visage, et les deux opposés, donneuse de vie et meurtrier, réunis dans le sang qui les maculaient, purent presque palper la haine mutuelle qu'ils se vouaient, sans pour autant pouvoir la laisser éclater, puisque la survie de l'un dépendait de celle de l'autre.

Kurgen s'avança pesemment vers le lit, en produisant le grincement disharmonieux d'une armure perclue de chocs. Derrière lui, ses gardes personnels ferraillaient, et semblaient pour le moment pouvoir contenir tout assaut. Le Baron écarta d'un geste la jeune assistante, tomba à genoux à sa place, et regarda sa femme, son visage livide et défait de douleur, ses yeux à moitié clos, sa bouche entrouverte. Elle n'était plus que l'ombre d'elle-même, et la mort l'emportait. Sa voix fut dure et sévère, pleine de résignation.

"Fais ton office, femme ! Cet enfant est le plus important, pour Laek'Na'Tyl, et pour la Reine Sorcière ! Kcehtra, Vois ce que tu fais de tes serviteurs... Tu joues avec, tu leur dispenses douleur, chaos, trépas, et tu ries devant leur ferveur à te défendre !"

D'un bond il fut debout, et il se mût jusqu'à la fenêtre. La sage-femme ne perdit pas plus de temps, et commença une incision franche. L'homme arracha le rideau, et asséna un terrible coup de poing dans le volet, qui céda dans un craquement sonore et s'envola au-dehors. Puis ce ne furent que hurlements rageurs.

"Kcehtra ! Regardes-nous ! Observe la douleur de tes serviteurs ! Si je dois mourir, alors ce sera en regardant le disque de ton soleil agonisant ! Prend ma femme, mon enfant, et moi-même ! Ravage mon domaine, car tout ici t'appartient. Et bientôt il en sera de même pour la Reine et son Palais, puis pour ton Royaume sur cette Terre !"

Le ciel le toisait en retour, empli de l'huile rougeâtre du soleil naissant.

Partie 4

Par Kalder'Shee le 15/12/2001 à 2:00:15 (#554202)

La sage-femme extraya l'enfant dans un déchirement sinistre. Il n'eut pas plus la force de pousser son premier cri, que la Baronne de crier son dernier soupir. Puis la lumière pourpre envahit la scène. Le disque rougeoyant commença à apparaitre, diffusant son aura de terrible présage. Les clameurs de bataille semblèrent étouffées, intimidées par l'énergie qui se déployait, et le Baron dut se couvrir les yeux de sa main pour ne pas être ébloui. Il s'écarta vivement de la fenêtre, et vit la sage-femme tenter d'animer l'enfant, auréolée du halo de l'influence de Kcehtra.

Il vit l'instant comme ralenti, une femme s'escrimant à donner vie à un être fragile, dont le présent était déjà si compromis, et l'avenir si terrifiant. Il songea un instant que tout n'était que peine perdue, qu'une seule vie apparaissait à l'instant même où des centaines d'autres périssaient, à des lieues à la ronde. Peut-être était-il finalement bénéfique que l'enfant meure, et que la lignée disparaisse avec lui. Les efforts de la sage-femme semblèrent vides de sens, même néfastes...

Et enfin une vision se forma, derrière cette scène... La Reine Sorcière, sa lignée millénaire, son pouvoir infini, son allégence éternelle à Kcehtra, Dieu dont la seule mention suffisait à faire trembler les armées. Et la mémoire de ce royaume, qui recelait la vérité, était toute entière en ce château, dissimulée par la pierre et l'oubli. L'espoir naquit à nouveau.

Enfin, la minuscule poitrine se souleva dans un spasme, et ses yeux s'ouvrirent en grand. Les rayons pourpres du petit matin s'y ruèrent alors, prenant possession des globes innocents, et les marquant à jamais de leur couleur.

L'on entendit, comme autant de rafales sifflantes et résonnantes, quelques mots...

"Je prends, je donne.
Cet enfant n'était déjà pas le tien.
Il sera le mien.
Le Fils de l'Ecarlate,
Pour la Gloire
De la Reine Sorcière !"

Les derniers mots furent si disctincts, et prononcés avec tant de force, dans une rafale si puissante, qu'ils résonnèrent dans les esprits de tous. Un tourbillon se forma autour du Baron, et se déplaca vers la fenêtre, emportant les débris de bois avec lui. Une fois sorti, il engloba la tour dans son cercle, et prit une ampleur terrifiante. Il se déplaça alors au-dehors de la forteresse, et ravagea l'assaillant de sa fureur venteuse. Le Baron resta à la fenêtre un instant, encore interdit, puis, avec une vigueur renouvelée, il se tourna vers sa garde personnelle toujours ferraillante, qu'il harangua.

"Kcehtra est avec nous, nous ne risquons plus rien ! La mort en sa présence est le plus grand présent qu'on puisse lui faire ! Pour Laek'Na'Tyl ! Pour les Reines ! Fer et Fureur !"

Le cri fut repris, si fort que le seul son qui put le couvrir fut le fracas de métal du Baron se ruant dans la mêlée, avec la grâce de Kcehtra.

Partie 5 (fin)

Par Kalder'Shee le 16/12/2001 à 4:00:26 (#562336)

Au-dehors, par la fenêtre béante, les bruits de batailles se firent plus rageurs, puis finalement ils furent remplacés par des cris de victoire, ponctués en choeur par la devise de la Baronnie. L'ennemi fut ainsi défait, dérouté, et même pourchassé jusqu'aux frontières, le soir venu.

La sage-femme, imperturbable, fit comme à son habitude. Elle lava, linga avec soin l'enfant, celui qui allait devenir Baron de Laek'Na'Tyl quand l'heure serait venue. La coutume, qui voulait que les enfants aux yeux pourpres soient tués, épargnerait l'unique héritier de ces terres, malgré le présage que cela annonçait.

Elle savait que les temps futurs seraient difficiles. Elle ne se doutait pas qu'ils le seraient autant.

Par Karlin Krieg le 16/12/2001 à 9:52:12 (#563008)

Kcehtra le pourpre ne se complaierait il que dans le sang et la douleur...
Pourquoi se rit il ainsi de la mort ou plutôt...pourquoi la mort le fait il ainsi rire...
Une sombre destinée pèse sur ses serviteurs...je ne regretterai jamais le jour où je décidais de ne pas me mettre à son service...
Ce jour là, la peur de l'inconnu m'avait rendu visite... je lui en serais à jamais reconnaissant.

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