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La dernière journée (by Zeed Mithror)

Par Conrad McLeod le 12/12/2002 à 18:23:38 (#2771755)

*Un jeune homme apporte une liasse de papiers au temple de LightHaven*
- Nous les avons trouvés sur le corps d'un homme sur la plage.. tenez.. nous nous sommes chargés de l'enterrer... il a du faire naufrage.

*_-_-_*

Mon nom est Palayareth, et aujourd'hui je vais mourir.
Depuis trois lunes nous défendons la cité forteresse de Trandling.
Depuis trois lunes la mort me frôle, enlève les miens comme mes ennemis mais toujours m'épargne.
Mais aujourd'hui elle est venue pour moi, je le sens, je le sais.
L'ennemi est toujours présent sous le dernier rempart. Pourquoi ne le serait-il pas? Il en a déjà abattu trois. Le dernier tombera comme viendra la nuit. Mais avant cela, il me faudra vivre la dernière bataille, ma dernière bataille. Je prie Brehan de me laisser vivre cette dernière journée dans son entier. Je veux sentir encore ma lame prendre la vie de ces barbares. Ils nous traitaient de minables aux premiers jours... mais à présent ils nous respectent et les insultes se sont tues. C'est normal en un sens.. tous ceux qui méritaient d'être insultés sont morts, et beaucoup des leurs sont morts. Pas assez. Je le sais. Ils le savent. Nous le savons tous. Tous les gens que j'ai croisés ce matin m'ont dit adieu, et je leur ai rendu le Dernier Salut. En un sens nous sommes déjà morts. Même ce paladin, avec son armure toujours blanche le matin et écarlate le soir. Il aurait du commander un bataillon puisqu'il semble être un proche du Seigneur Duc. Pourtant, tous les jours, je le vois se dresser avec la troupe sur les remparts. Mais il mourra lui aussi, malgré son fléau et son grand bouclier.
J'espère me battre à ses cotés car il se bat bien et ensemble nous pourrons voir la fin. La fin de Trandling. La fin de nos vies.
Ce n'est pas la première fois qu'il vient ici, je l'avais déjà vu auparavant. Je me souviens aussi de ce qu'on dit qu'il a fait pour le Duc jadis. J'ai du mal à croire qu'un étranger ait fait tout cela pour finir par mourir sur ce rempart, loin de chez lui et des siens. Je le vois souvent écrire sur son bouclier. Un soir, il est venu vers moi et m'a parlé. Il me parlait de la paix qui doit régner, de l'amour des hommes, de la nécessité de protéger tout cela. Il m'a dit de lui écrire quand tout serait fini sans me donner d'adresse, juste son nom et le nom d'une île... Arakas. Ce nom n'évoque rien pour moi, mais si c'est une île elle doit bien être connu par quelque marin.
De toute façon, cela n'a guère d'importance. Bientôt je serai mort. Et lui aussi. Pourtant il avait l'air convaincu que je survivrai. Qui sait ? Je serais heureux qu'il soit devin, mais je ne vois pas comment je pourrais survivre à cette journée. Je n'ai pas l'intention de fuir comme ces couards que le Duc a laissé partir cette nuit.
J'entends la clameur des barbares qui commence à résonner entre les parois de la gorge montagneuse que la cité forteresse défend. Bientôt ils attaqueront. Bientôt je mourrai. Seul. Sans famille. Ami d'un soir de soldats qui n'ont plus la force de se traîner jusqu'à la taverne pour boire leur dernier verre.
Puisse mon témoignage rester dans la mémoire de ceux qui me liront. Car ainsi je vivrai encore un peu en eux.
Ma lame est prête.
Mon âme est prête.
Adieu.

*_-_-_*

*Deuxième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie fournie gracieusement par les archives du temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Le premier assaut de la matinée a été repoussé. Dans le sang une nouvelle fois. Nous ne comptons plus nos morts mais la horde qui nous assiège fait de même. Avant l'assaut leurs hurlements ont une nouvelle fois envahit la passe. Les nôtres leur ont répondu. Il y a bien longtemps que nous n'avons plus d'espoir. Un coursier est arrivé pendant la bataille annonçant une compagnie de quatre mille lanciers d'un baron allié faisant route vers la cité. Ils arriveront trop tard. Nous ne sommes même plus un millier ici et avant ce soir tous auront fuit ou seront morts. Le cadran solaire du donjon du Seigneur Duc indique à peine dix heures du matin. Il y a quelques instants encore nous nous battions mais les barbares ont reflué sans parvenir à prendre pied sur le rempart. Bientôt ils reviendront. Je fais confiance à leur chef pour les renvoyer au combat jusqu'à ce que nous rendions les armes. Mais je briserai mes armes plutôt que de les rendre et je sais que tous ceux qui restent feront de la même chose. Et aucun de nous ne songe un instant à se rendre. Tout comme la horde ne s'attend pas a ce que nous nous rendions. Tous ici, nous voulons vivre un dernier combat et connaître une mort honorable. Ceux qui sont morts ce matin doivent être heureux quel que soit leur camp. Je me rends compte que toute ma vie n'a été qu'une suite sans fin de batailles et dentraînements. Tout cela pour que je vienne ici, en ce jour de printemps, mourir sur les remparts de Trandling.
Tout à l'heure, quand les trompes ennemies ont sonné la retraite, le paladin blanc est venu vers moi. Son armure était toute maculée de sang du heaume aux chausses. Il a encore fait forte impression pendant la bataille. Il se battait comme un démon furieux et l'air autour de lui semblait fait d'un brouillard rosâtre de sang mêlé de sueur. Pourtant il n'a pas proféré un cri, pas une insulte, pas un hurlement. Rien qui puisse donner à penser qu'il était en train de se battre plutôt que de sentraîner. Mais je n'ai pas pu l'observer bien longtemps car bien vite j'ai été trop occupé à défendre mon bout de rempart.
Pourtant ce n'est pas cela qui m'a le plus frappé en lui... Ce sont ses yeux quand il m'a parlé. Il a enlevé son heaume de métal doublé d'écailles bizarres, découvrant son visage. Puis, il s'est approché, et se penchant vers mon oreille il a posé une main sur mon épaule en disant :
- Tout à lheure, quand les barbares auront pris pieds sur le rempart, va voir le Duc. Il a une dernière mission pour toi.
N'en parles à personne. Fais-le.
J'étais trop hébété pour répondre. Je ne m'attendais pas à ce que le Duc me connaisse. Et encore moins à ce qu'il songe à me confier d'autre mission que de mourir sur ce tas de pierres pour le défendre. Je n'ai plus le choix à présent, il va falloir que je quitte le champ de bataille quand la défaite sera inévitable et que je renonce à voir la fin. Qui sait peut-être y aura t'il quelque gloire à tirer de cette ultime mission pour mon seigneur et maître ! En tout cas, je ne puis désobéir. Même si j'enrage de devoir abandonner la bataille il me faudra m'y contraindre.
Assez écrit à présent. Il me faut participer à la préparation de la prochaine attaque ennemie. La surprise sera rude pour eux.. si toutefois ils nous laissent le temps de la préparer.

*_-_-_*

*Troisième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

La guerre est une chose étrange qui rend les hommes stupides. Pendant que les barbares se regroupaient sur le second rempart ou les quelques archers qu'il nous reste ne pouvaient les harceler nous avons apporté au bord du rempart des pierres issues de la démolition de deux maisons qui de toute façon n'abriteront plus personne. Quand l'attaque a été déclenchée nous avons attendu. Quand les échelles ont fleuri sur le rempart nous avons attendu. Quand les barbares se sont engagés à l'assaut nous avons attendu. Puis quand ils ont été presque rendus au sommet nous avons fait basculer toutes les pierres que nous avions amassées. L'attaque a été rompue presque immédiatement et la horde a une nouvelle fois fait demi-tour, laissant dans la poussière les corps de presque un millier des siens.
Le paladin n'est pas revenu me parler. Il s'est rendu au donjon du Seigneur Duc de suite après la retraite ennemie. Les deux gardes l'ont laissé entrer sans lui poser la moindre question alors que d'ordinaire ils sont pointilleux et soupçonneux. Qui est-il donc ? Il se bat avec les simples soldats, toujours en première ligne, puis dès que l'attaque est repoussée, il disparaît.. soit à l'hôpital soit dans le donjon pour ne plus en ressortir qu'à l'aube d'un nouveau combat. On dit qu'il est un conseiller... Mais un conseiller ne se battrait pas.
Je dois oublier ces questions et ne plus penser qu'à la prochaine bataille. Sinon je n'aurai plus l'occasion de poser de questions. Je me hâte d'écrire tant que j'en ai encore la lucidité. Bientôt tout ici sera noyé dans le sang, les pensées, les hommes, jusqu'à ce dernier rempart auquel nous nous raccrochons comme s'il devait nous sauver la vie. Comme si ce rempart qui n'attire que la mort pouvait attirer quelque clémence divine devant le courage de ses défenseurs et l'acharnement de ses assaillants ! Mais il faudra que je survive encore à au moins un assaut avant d'aller prendre mes ordres auprès du Seigneur Duc.
Le soleil a maintenant dépassé son zénith depuis deux bonnes heures. L'attaque ne devrait plus tarder à présent. D'ailleurs, le paladin est de retour sur le rempart. Il se prépare pour la bataille, sans hâte, méthodiquement... comme un vieux soldat. Il semble pourtant jeune encore car sa toison n'a pas encore blanchi et les coups qu'il lâche sont dévastateurs. Mais ce n'est pas le meilleur des défenseurs. Le Capitaine Garil avec sa lourde hache fait des miracles sur son aile notamment et personne ne songerait à contester sa force. Mais personne ici n'a le calme étrange, le détachement, du paladin étranger.
Il n'est pourtant pas inhumain pour autant puisqu'il rit souvent avec les hommes qu'il croise. Mais quand il se bat, il n'est tout simplement plus le même. Comme s'il contenait en lui quelque chose qu'il ne veut pas montrer.
Les guetteurs sonnent à nouveau dans leurs trompes d'alerte. La guerre me rappelle à elle et vient m'offrir une nouvelle occasion de mourir.

*_-_-_*

*Quatrième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Ils sont revenus s'échouer sur le rempart. Les barbares lancent leurs assauts comme la mer fait des vagues. Encore une fois nous les avons repoussés. Mais encore une fois nombre des nôtres ont péri. A la prochaine attaque ce sera la fin. Tous ici le savent. Le paladin est revenu vers moi à la fin de l'attaque. Il m'a demandé de me battre à ses cotés tout à lheure. Peut-être a t'il peur que je m'enfuie sans accomplir ce que le Seigneur Duc attend de moi. En ce cas je le surprendrai car j'ai la ferme intention d'obéir jusqu'à la fin. J'entends déjà les trompes des barbares résonner contre les montagnes qui nous entourent. Ils n'attendront guère avant de lancer leur dernière poussée sur le mur. Comme d'habitude nous allons devoir nous battre contre des ennemis émoussés par l'escalade des deux terrasses qui les séparent de nous. Comme d'habitude ils seront bien supérieurs en nombre. Mais cette fois-ci, contrairement à l'habitude, nous ne les repousserons pas.
Nous ne sommes plus que trois cent. Nous serons balayés. Les barbares sont encore plus de deux mille. La forteresse tombera avant la nuit. Mais pour autant nous n'aurons pas perdu. Nous les avons saignés à blanc. La puissance de la horde s'est fracassée contre la forteresse et s'est épuisée. Pas en vain. Ô non, pas en vain. Les trois quarts de la garnison de Trandling ont péri au combat. Le reste se trouve soit sur le dernier rempart pour y mourir, soit, pour les plus faibles, en train d'escorter les femmes et les enfants vers la capitale. Le conseil saura bien où les envoyer et du moins seront-ils à l'abri. Je suppose que bien sur les barbares mèneront quelques raids sur nos terres, ravageant ca et là quelque petite cité marchande. Mais le pire est d'ores et déjà évité. Les lanciers qui approchent ne leur laisseront que quelques jours de répit et de pillage avant de reprendre la cité, ou plutôt ses ruines.
Je me demande quel genre de mission le Seigneur Duc me réserve. Sans doute de garder sa porte le temps qu'il en finisse honorablement. Ou peut-être de mourir avec lui qui sait. Je me suis bien battu sur ces remparts. Ce sera un honneur que d'obéir à ses derniers ordres. Les barbares reviennent, je dois me hâter. Le cadran solaire marque tout juste cinq heures.
Je n'aurai sans doute plus l'occasion d'écrire quoi que ce soit d'autre que du sang sur le champs de ma dernière bataille.
J'ai mené une vie heureuse, vouée à mon Seigneur Duc jusqu'à son dernier souffle et jusqu'au mien.

Par Conrad McLeod le 12/12/2002 à 18:25:17 (#2771765)

*_-_-_*

*Cinquième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Il semblerait que cette dernière journée ne soit pas la mienne. J'ai survécu à la dernière bataille de Trandling sous l'ère de mon Seigneur Duc. Les barbares ont mené ce soir leur assaut le plus furieux contre le rempart. Nous les avons contenus le plus longtemps possible. Mais ils ont fini par prendre pieds sur la dernière terrasse. Tous sont morts à présent. Tous sauf l'Enfant du Duc, le paladin, et moi. Le paladin a montré un autre visage au cours de la bataille. Lui qui n'avait jamais proféré un son en se battant, ce soir, j'ai eu l'impression qu'il était le Diable.
Pour la première fois il n'était pas en première ligne. Pour la première fois je ne l'ai pas vu se protéger de son heaume. Pour la première fois il ne portait ni son bouclier ni son fléau habituel. Ce soir, il n'était pas lui-même. A présent je sais son secret. Il est un Berserker. Un fou de guerre se cache sous son armure immaculée. Pourtant il semble avoir un certain contrôle sur son Don, contrairement à ce que je pensais. Ce doit être cela qu'il refoulait à grand-peine. Tous ici ont compris qu'un démon se battait à leurs cotés. Il a bien fait de se cacher. Si nous l'avions découvert plus tôt nous l'aurions tué nous-mêmes. Mais pour la dernière bataille il n'a pas pu le cacher. Il est sorti du donjon avec une hache d'armes dans une main et une épée longue dans l'autre. Ses pensées n'étaient plus tournées que vers la mort. La mort donnée et la mort reçue. La bataille était déjà commencée quand il est arrivé.
Il est resté un instant sur la ligne arrière puis s'est approché de l'endroit ou je me battais. Je ne l'avais pas attendu pour aider mes compagnons à défendre notre dernier espoir. Le hurlement qu'il a poussé m'a tellement surpris que j'ai failli en lâcher mon épée. Je me suis dégagé précipitamment comme un barbare bondissait de l'échelle pour grimper sur le rempart.
Juste a temps pour le voir s'écrouler, fendu en deux de l'épaule gauche à la hanche droite malgré son armure. Et ce hurlement qui n'en finissait pas! Il venait de me sauver la vie et pourtant je mourrai d'envie de lui passer ma lame en travers le corps. Sans doute à cause de toutes les histoires de taverne où l'on raconte que tous les Berserkers tuent les femmes les enfants et les vieillards et s'attaquent aux villages quand les hommes sont aux champs.
Tout se passait bien, nous maintenions les barbares sur leurs échelles et ils ne parvenaient pas à s'installer sur le rempart quand notre flanc droit a cédé. Les barbares ont poussé une immense clameur et ont redoublé d'efforts. Le paladin a relevé la tête et à couru vers la dizaine d'hommes qui se battaient désespérément contre les assaillants. J'ai cru qu'il allait les abattre mais il a traversé le rang et s'est retrouvé seul, entouré d'ennemis. Il hurlait comme un démon et frappait comme un enragé. Chacun de ses coups donnant naissance à une fontaine de sang. Et moi, au comble de l'horreur, alors que la défaite et la mort inscrivaient leur nom dans le sang des défenseurs, moi, j'ai trouvé cela beau!
La surprise passée, le paladin fut rapidement secondé par d'autres hommes qui dégarnissaient un peu le centre. les barbares furent repoussés une nouvelle fois. Mais sur tout le front de petites poches commençaient à se former, alimentées par les échelles que nous ne pouvions plus atteindre. L'heure était venue d'aller au donjon, prendre mes derniers ordres. Le paladin l'avait compris aussi car sa fureur s'était apparemment calmée. Nous quittâmes la dernière terrasse sans hâte. Sans mots inutiles. Sans nous retourner. Il me précéda dans la relative fraîcheur du donjon du Seigneur Duc. Celui-ci nous attendait dans sa chambre. Il paraissait vieilli. Les paroles qu'il nous adressa alors resteront pour toujours gravées dans ma mémoire.

*_-_-_*

*Sixième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Trouver l'épée. Moi qui pensais mourir ce soir bien c'est raté on dirait. Il n'empêche que pour le coup j'aurais préféré. J'écris à la lueur rougissante du soleil couchant. Au loin, derrière une crête rocheuse s'élève une lourde colonne de fumée noire. Ce soir, la cité-forteresse de Trandling est la proie des flammes. Le vent m'apporte les derniers hurlements assourdis par la distance. Il me faut me détourner. La bas tout est mort de ce qui défendait les remparts.
Pour ma part, je suis vivant. Mais je ne suis pas libre. J'ai une dernière mission à accomplir pour Feu mon Seigneur Duc. Je dois trouver une épée et la ramener au paladin, chez lui, sur cette île au nom étrange. j'aurais bien offert mon épée pour cette tâche. Mais il semblerait qu'elle ne puisse convenir. Il me faut retrouver celle de mon Seigneur Duc. Seule qui puisse assurer la légitimité de l'Enfant.
Mon Seigneur Duc m'a remercié pour mon courage et mon dévouement. Il m'a appelé par mon nom. Et il a posé la main sur mon épaule. Je suis fier de le servir dans sa mort comme je l'ai servi de son vivant. Il ne peut être que mort à présent. Mais avant que nous partions par le souterrain il nous a récompensés tous les deux. Le paladin et moi. Puis il m'a demandé de partir me consacrer à ma mission et de mériter la reconnaissance des siens. Je n'ai pas vu l'Enfant. Je sais juste que quand j'aurai trouvé l'épée, je devrais la ramener sur Arakas, au paladin que je reconnaîtrai sans peine. Je devrai alors servir l'Enfant comme j'ai servi son père.
Je suis descendu dans le souterrain. Je sais que l'Enfant est parti plus tard avec le paladin. ils devaient prendre à gauche au croisement dans le tunnel. Moi j'ai du prendre à droite. Pour obéir aux ordres. Je ne dois pas voir l'Enfant. Le paladin a toute la confiance de mon Seigneur Duc pour prendre soin de lui. Et moi j'ai toute sa confiance pour retrouver l'épée et la lui ramener. Pourtant la tâche ne sera point si aisée qu'il y parait. L'épée a été offerte à un ancien ami du Duc qui avait pris part avec lui à de nombreuses batailles pour défendre le Conseil. A l'issue de ces batailles chacun était reparti avec l'épée de l'autre en gage d'amitié. A présent, il est temps que chacune des lames retrouve sa famille.
J'emporte donc deux lames vers les terres de Cymod. la mienne pour me défendre, celle du Seigneur de ces terres pour la lui restituer et obtenir de lui l'ancienne Lame de mon Seigneur Duc. Brehan fasse que je réussisse !
Les paroles de mon serment me reviennent en tête, résonnant comme les trompes des barbares sur les flancs de la passe de Trandling :
Pour mon Dieu, pour mon Seigneur,
Sur ma vie, sur mon honneur,
Je le ferai.

*_-_-_*

*Septième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Je fais halte un instant pour reprendre quelques forces. Les terres de Cymod furent assez faciles à trouver. Mais l'épée n'y était plus. Le Seigneur Kaastrig était parti guerroyer pour le conseil sur le front Est. Les mornes plaines du centre ont à présent fait place à de verdoyantes collines et si mon avancée s'en trouve quelque peu ralentie, elle n'en est pas moins plus agréable. Cela fait quatre jours que je marche. Depuis que j'ai quitté Cymod et que je recherche l'Ost de Kaastrig je n'ai pas beaucoup dormi. Je sais que je devrais prendre du repos mais plus vite ma mission sera accomplie, et plus vite mon esprit s'en trouvera allégé par la satisfaction d'avoir fait mon devoir.
Quand je pense que les pendards de Kaastrig ont failli me tailler en pièces en me voyant arriver, j'enrage ! Ils s'attendaient peut-être à ce qu'un homme seul et à pieds ayant traversé la moitié du continent soit aussi propre et présentable qu'une princesse au bal annuel du conseil ! Qu'en ai-je à faire que les mendiants ne soient pas les bienvenus en ville ? Je n'en suis pas un. Heureusement que le chambellan était resté sur place pour gérer les affaires courantes comme on dit. Sans cela j'aurais vu ma mission s'achever au bord d'un fossé. Quel genre de seigneur est-ce là qui méprise son peuple ? Je préfère servir Feu mon Seigneur Duc et j'espère que l'Enfant lui ressemblera.
Le chambellan par contre semble courtois et affable avec les étrangers. En tout cas il le fut avec moi dès qu'il eut entendu le motif de ma venue. Il m'a donc permit de prendre quelque repos et un bon repas et semblait regretter de me voir repartir si vite. Mais il m'a donné tous les renseignements dont j'avais besoin pour rejoindre son Seigneur. j'ai trouvé son dernier campement il y a quelques heures et bientôt j'aurai rejoint sa colonne. Au vu des traces il y a quelques quatre cent hommes à pieds et autant de cavaliers.
Je repense souvent à Trandling. Ce nom qui pour moi signifiait la puissance et la sécurité de sa forteresse ne signifie plus que la mort et la désolation pour moi. Ce sont les dernières images que j'en garde. Le sang et les ruines hantent mes cauchemars et parfois je me prends à en rêver en marchant.
Je me sens plus reposé à présent que j'ai écrit cela. Cela fait une heure que je suis arrêté. Il me faut à présent me remettre en route. Avec un peu de chance je trouverai le seigneur Kaastrig avant la nuit.

*_-_-_*

*Huitième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Les corps semblent avoir été jetés pêle-mêle, entassés ca et là en monticules macabres. Voilà tout ce qui reste de l'Ost du Seigneur Kaastrig. Ma mission me semble pour le moins compromise. Pas tout à fait cependant car j'ai repéré de nombreuses traces semblant se diriger vers une des forêts proches. Je profite de l'abri momentané fournis par l'un des monticules pour prendre quelques repos. L'odeur ne me gène plus depuis Trandling. Pas plus que la vue des corps déchiquetés ou criblés de flèches. J'ai fouillé rapidement quelques-uns uns des corps pour vérifier s'ils avaient été attaqués pour leur or. Mais une troupe de bandits n'attaquerait pas un Ost pareil. Ce devaient être des troupes ennemies.
Je n'ai pas trouvé l'arme que je recherche sur le champ de bataille. La plupart ont été récupérées par les assaillants sans doute pour être refondues. Seules les plus belles sont conservées comme prise de guerre. Celle de Feu mon Seigneur Duc devrait en être d'après la description qui m'en a été faite. J'aurais préféré la récupérer simplement en l'échangeant avec celle du Seigneur Kaastrig. Mais à présent je n'ai pas le choix, il va me falloir aller la chercher en territoire ennemi.
En attendant que se passent les quelques heures qui me séparent du crépuscule je tâche de reprendre quelques forces. Ai-je plus de chance que mes compagnons morts à Trandling ? Mes épreuves se poursuivent alors que les leurs se sont terminées glorieusement. Mais Brehan aime les épreuves. Et moi j'aime être vivant. Ce soir j'irai dans la forêt, suivre les traces.
Je retrouverai l'épée. Et je la ramènerai au paladin. Alors quand l'Enfant sera prêt, nous le servirons ensemble.
Nous irons voir le conseil. Pour que l'Enfant soit reconnu de tous. Et nous retournerons à Trandling. Pour défendre la passe montagneuse qui m'a vu grandir. Qui sait si couvert de gloire quelque femme ne voudra pas de moi pour époux. Nous aurons des enfants. Et je les élèverai en bons soldats. Ils serviront bien l'Enfant du Duc comme j'aurai bien servi son père.
Mais nous n'en sommes pas encore là. Ce soir, ce qui est important, c'est de retrouver cette épée. Et de disparaître avec au plus vite. Je trouverai bien quelque port le long de la cote du sud. Et de la je gagnerai l'île du paladin. Je serai heureux de le revoir. J'espère qu'il sera heureux que je réussisse.

*_-_-_*

*Neuvième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth sur la plage de LightHaven. Copie gracieusement fournie par les archives du Temple de LightHaven.*

*_-_-_*

Voilà deux nuits et un jour que je cours sans faire halte plus de quelques minutes. Il me faut m'arrêter pourtant maintenant. Je suis épuisé. Il y a deux nuits, j'ai suivi les traces qui menaient à la forêt. J'ai suivi cette piste le long du bois qui menait à un nouveau sentier. Celui-ci senfonçant sous les arbres, je me suis un peu écarté et l'ai suivi à l'écart pendant de nombreuses heures.
J'ai fini par faire halte à l'orée d'une vaste clairière encombrée de tentes. J'ai attendu longtemps que le camp se calme et que la plupart des hommes aillent dormir. Ensuite j'ai prudemment fait le tour du campement, puis détaché tous les chevaux que j'ai pu sans éveiller la méfiance des gardes. J'ai du en laisser un grand nombre à l'attache hélas. Cela fait, je me suis avancé dans le camp en profitant des zones d'ombres formées par la lumière des feux de camp sur les tentes.
Je me suis rapproché le plus possible du grand édifice de toile qui semblait être la tente du chef. J'ai du attendre que les hommes de garde tournent le dos pour me jeter sous la toile à plat ventre. J'ai encore attendu un moment pour savoir si j'avais été repéré. Mais rien n'avait semblé troubler les gardes dont les pas continuaient à fouler l'herbe régulièrement.
L'intérieur était éclairé sans risque par des torches couvertes. Tout n'était que tapis luxueux et vaisselle raffinée. Affalé sur des coussins écarlates, un homme dormait d'un sommeil lourd. Par chance le butin de la dernière razzia était entassé du coté ou j'étais entré. Je dus cependant prendre garde à ne point faire le moindre bruit qui puisse réveiller "mon hôte". Après quelques minutes de recherche silencieuse je trouvai enfin l'objet de ma quête et, m'en emparant je sortis tout aussi silencieusement de la tente par où j'y étais entré.
J'ai ensuite rejoint précautionneusement la pénombre soulageante de la forêt et me suis mis en route vers le sud en prenant garde à laisser le moins de traces possible de mon passage. Je ne me suis pas arrêté depuis. J'ai quitté la forêt au matin puis j'ai traversé une lande valonnée parsemée de buissons épineux avant d'arriver à des contreforts montagneux. Je sais que j'attendrai bientôt la mer. En suivant le rivage je devrais trouver un port quelconque qui me permette de gagner Arakas. Ou a défaut un port plus grand où je pourrai me renseigner.
Allons, il faut que je me remette en route. Je suis soulagé de voir que mes pas ne laissent plus de traces sur le roc. Cela me change un peu de la lande bourbeuse d'hier. Apparemment mon larcin n'a pas été remarqué. Ou ils n'ont pas retrouvé ma trace. Ma mission est presque achevée. Je suis heureux d'être encore utile à mon Seigneur Duc. Le paladin sera content de m'entendre conter mon périple, lui qui passait souvent le soir conter les siens aux hommes de Trandling.

*_-_-_*

* Copie du dixième parchemin trouvé sur le corps du dénommé Palayareth, jadis soldat de Trandling, dont il vécut toutes les batailles, et à laquelle il survécut. Avec l'aimable autorisation du temple de LightHaven *
Enfin me voici arrivé. Ce port est sans doute le plus minable de toute la cote mais du moins y a t'il une auberge (En fait une taverne qui dispose d'une salle couverte d'une vieille couche de paille moisissante où dorment les poivrots qui ne sont plus en état de rentrer chez eux). Encore une fois j'ai bien failli périr. Peu glorieuse mort que de mourir de faim et de soif, perdu à flanc de montagne... Je n'avais plus de provisions depuis trois jours quand j'ai trouvé l'océan. La chance a voulu qu'une barque de pêcheurs longeant la cote me recueille et me débarque au port le plus proche.
Il me faut me hâter, j'ai pu rejoindre un port plus grand et le prochain Navire pour LightHaven lèvera l'ancre dans un instant. Avec de la chance j'y serai dans moins d'une lune et j'aurai eu le temps sur l'eau de faire la connaissance de...

*_-_-_*

Une âme tourmentée,
Sensible mais cachée,
Se prit un jour d'aimer,
Bien plus que d'amitié.
Mais l'élue de ce cur,
Rejetant le bonheur,
La renvoya en pleurs,
Vivre dans son malheur.
La vie est une fleur,
Avide de soleil,
Mais tôt le vent courbeur,
La renvoie au sommeil.
Ami, toi qui me lis,
Gardes toi de chérir,
Plus qu'il ne t'est permis,
Pour ne pas trop souffrir.
L'amour est formidable,
Quand il est partagé,
Mes vers sont agréables,
Mais nul ne peut m'aimer.
Palayareth,
Compagnon du Duc de Trandling,

*_-_-_*

-----------------------------------
Un dernier mot de l'auteur...
Ceci est la fin du Cycle de Palayareth. Je réunirai bientôt les dix épisodes en une seule publication, sur ce forum. D'aucuns ne manqueront pas de me demander comment Palayareth périt... J'avais décidé dès le début que sa vie s'achèverait avec cette histoire.
Je l'ai annoncé d'emblée pour ne pas avoir le choix de revenir sur cette décision. Afin que personne ne s'attache à lui. Mais je n'ai pu.. le tuer moi-même, enfin raconter sa mort.
Ce dernier parchemin n'apporte pas grand chose à son parcours général pour venir de Trandling et je conçois que certains soient déçus de voir l'histoire s'en trouver incomplète... Mais je lui donne dans la mort une chose qui lui manquait pour en faire en quelque sorte... un être humain. J'achève donc mon cycle en donnant un cur à ma création.
C'est étrange, j'ai l'impression d'être un père tenant son fils mort dans ses bras.
Triste de le voir mourir, et en même temps heureux pour lui que ses souffrances s'achèvent.

*_-_-_*

Par Conrad McLeod le 12/12/2002 à 18:27:27 (#2771786)

Recopié sans l'autorisation de l'auteur...
Le texte n'est pas bien gai, mais il est si magnifique.

Par Zeed Mithror le 12/12/2002 à 22:05:35 (#2773393)

*Sourit* Tu as bien fait :)
Pour situer un peu ceux que ca intéresse, l'action relatée dans ces textes a lieu quelques années avant les évènements décrits dans "Retour à Trandling".

Puis sinon, pas besoin de mon autorisation pour ça hein... Enfin pour le cas où cela te semblerait nécessaire tu l'as ;)

Zeed.

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