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Un début d'histoire commencé il y a longtemps

Par Grenouillebleue le 3/12/2002 à 16:59:55 (#2702808)

C'était censé être l'intro d'un livre qui n'a jamais vu le jour.
J'ai retrouvé ça dans mes tiroirs (beuuuh, qu'est-ce que j'écrivais bizarrement à l'époque :rasta: ), donc je le soumets à votre appréciation :D




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Brajan était fatigué.

Il n'aimait ni l'endroit, ni les circonstances, ni le temps qu'il faisait dehors. Il n'aimait pas la violence, il n'aimait pas la guerre. Et par dessus tout, il haïssait la boue.

Ses bottes en peau de daim s'enfonçaient dans la fange à chaque pas, avant d'en ressortir avec un bruit de succion écoeurant. Il les avait payées dix-neuf sequins chez un marchand Aredinien. Le gros homme lui avait vanté leur étanchéité parfaite. Ha !

"Mieux vaut encore croire son épouse qu'un Aredinien" cita Brajan sans conviction

Il n'était pas marié, et ses pieds étaient trempés.

Le temps n'allait pas en s'améliorant, et son humeur non plus.
Cela faisait bien trois jours qu'il pleuvait des cordes. Les planifications se faisaient sous la pluie, les stratégies se décidaient sous la pluie, et les batailles se livraient sous la pluie. En désespoir de cause, il se retira sous sa tente.

Quelque chose lui disait que cela n'aurait pas dû se passer comme cela. Ils possédaient à eux huit un incroyable potentiel magique, et auraient dû être capable d'influencer le temps tout autour d'eux, sur une zone considérable. Pourtant, c'était Eux qui menaient la danse. Eux. Et surtout Lui.

" Maître De'Stil ! "

Brajan tourna vivement la tête alors qu'un jeune soldat rentrait sous sa tente sans prendre la peine de se faire annoncer. Des gants sales écartèrent les tentures plus avant, et le vent de la nuit s'engouffra avec le nouveau venu. Les innombrables parchemins qui parsemaient la grande table en chêne s'agitèrent en tous sens ; l'encrier que Brajan avait fort judicieusement placé dessus pour les immoboliser tomba à terre.

C'était un vent humide et mordant, qui avait fait le tour des champs de bataille. Un vent que plus rien ne pouvait surprendre, et qui charriait l'odeur fétide des morts et de la fosse commune.

Le Haut Mage eut un frisson alors que l'odeur lui montait aux narines, et reserra sa cape blanche contre lui. Blanche, immaculée, comme il l'aimait tant. Même s'il ne pouvait se permettre de gaspiller une parcelle de ses Pouvoirs pour éviter la pluie et la boue, il ne laisserait jamais l'insigne de son Ordre souillé. Et la cape restait blanche, la poussière et l'eau miraculeusement arrêtés à un pouce d'elle.

"Maître De'Stil" répéta le jeune soldat, reprenant son souffle.

Recouvrant un semblant de discipline, il se mit au garde-à-vous, attendant la permission de parler.

Brajan le regarda avec paternalisme. Quelque chose lui disait qu'il devrait se mettre en colère contre cette intrusion soudaine, mais il n'en avait ni le courage, ni l'envie. Un sourire apparut et disparut sur ses lèvres minces, alors qu'il se tournait vers le soldat. La ligne de Pouvoir qui protégeait le sorcier lui frôlait presque le menton, sans qu'il puisse la voir.

"Un pas de plus, et tu serais mort" annonça Brajan sur le ton de la conversation. "Boum. Plus de garde. Ce serait amusant à voir, ne crois-tu pas ?"

Le guerrier le regarda fixement, sans répondre. Un début de panique commençait à l'envahir.

C'était le problème, avec ces humains, décida Brajan. Ils pouvaient se montrer sans peur au plus fort de la bataille, mais la simple notion de magie les renvoyait tremblant et frissonnant dans les jupes de leurs mères.

Pourtant, celui-ci semblait plus courageux que les autres. Il ne détourna pas le regard, se contentant de déglutir, et d'attendre.
La pluie gouttait de ses longs cheveux, sur son visage blême. De toute évidence, il revenait d'une escarmouche particulièrement violente. Sa cuirasse, frappée aux armes du Ghondan, était cabossée en de nombreux endroits, et les mailles qui recouvraient ses bras et ses jambes n'étaient pas dans un meilleur état. Il était recouvert de boue et de sang séché, et son fourreau était vide. Il portait en remplacement un long couteau dans son ceinturon.

Brajan agita impatiemment la main.
"Bien, tu m'as dérangé, parle maintenant"

Le soldat ploya le genou et s'inclina.
" Avec votre permission, Maître De'Stil, des nouvelles importantes. "

Brajan eut un rire sans joie.
" Des nouvelles importantes ? Cela fait des heures que je reçois des messagers, et des heures que les informations se succèdent. Toutes importantes, toutes cruciales. Et, bien sûr, je dois revoir à chaque fois mes plans, tout cela parce que des incapables comme..." Il haussa les épaules, se maîtrisant à grand'peine. "Continue."


Il se détourna pour fouiller dans le seul coffre de la tente, celui qui contenait sa réserve d'alcool. Il allait en avoir besoin.

"Le Moulin a cédé, Commandeur" lança le messager, visiblement pressé de se débarasser de la nouvelle. "Des bêtes d'ombre nous ont attaqué, des créatures tout droit sorties de nos cauchemars. Des chimères, des démons grimaçants. L'armée a reculé. Nous..."

Plus il parlait, et plus le visage de Brajan se fermait. Le mage se versa un verre de Whisky et but sans hésitation. Lorsque le messager eut terminé, la bouteille était vide.

"Laisse-moi, à présent" gronda Brajan. "Je dois me reposer"

Le soldat eut l'air surpris.
"Sauf votre respect, commandeur, nous sommes en pleine déroute ! La bataille finale est proche, et elle est mal engagée !"

N'obtenant pas de réponse, il finit par partir.

Brajan le regarda se lever et se courber de nouveau pour passer la tenture. Le tonnerre gronda dehors, et il resta seul avec ce bruit sourd dans les oreilles, les yeux rivés sur le mur de toile. L'alcool lui brûlait les tempes.

Le combat final est proche. Cela sonnait bizarrement. Des années de complot, des années de guerre pour en arriver à ça...

"Ludmilla" murmura-t-il vaguement.

Le tonnerre gronda de nouveau, alors que la foudre tombait, quelque part dans les collines, non loin d'ici. Peut-être dix lieues, peut-être moins.






A dix lieues de la tente, Hermon resserra sa prise sur ses rênes. L'étalon noir qu'il montait dansa pendant un moment au son du tonnerre, puis se calma, les naseaux fumants, les yeux fous. C'était une bonne bête, solide, mais elle en avait trop vu.
L'air vibrait toujours de l'éclair précédent, et le vent charriait une odeur de cendres. Le mage noir rabaissa lentement la main qu'il avait levée vers le ciel. Un sourire sans joie dansait sur ses lèvres alors qu'il regardait le Moulin brûler en contrebas.

Oui, les maisons étaient en flammes, de longues flammes filiformes, des flammes sombres que la pluie ne parvenait pas à éteindre, comme celles qui avaient emporté Ludmilla, comme celles qui avaient embrasé ses cheveux, brûlé ses yeux, incendié son coeur.

Le manteau d'Hermon ressemblait à s'y méprendre à un linceul alors qu'il grimaçait un sourire.

Et la foudre tomba de nouveau.

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