Oubli [Petite nouvelle]

Par Killashandra le 29/11/2002 à 13:10:28 (#2671502)

Voici ce que l'on peut appeler une toute petite nouvelle... ou une toute petite histoire... Je l'ai écrite il y a de ça bien longtemps, et après l'avoir lue, je vous propose de tenter de trouver: soit un début (Comment en est-il arrivé là?) Soit une fin (Sortira t-il de là?)


Oubli

L’étendue désertique qui se déployait sous ses pieds, telle les ailes d’un sombre présage, semblait être infinie. Le soleil, rouge, dégageait une aura de puissance incommensurable. Cette masse rougeoyante semblait rire de sa présence en ce lieu. Il s’en moquait. Il était comme lui, seul, au milieu d’un tout.
Il regarda sa montre. Il ne savait plus qui la lui avait conçue. Elle était unique en son genre. Grand cadran composé d’une seule aiguille, elle pendait à une chaîne, faite d’un métal inconnu. Rien n’avait réussi à altérer cet ensemble montre chaîne, ni les intempéries, ni ses sautes d’humeurs, ni le passage des ans. Il aurait pu s’identifier à celui-ci sur bien des points, mais l’envie lui en manquait. Le désir était une des choses qu’il avait oubliées, ou décidé d’oublier.
Depuis combien de temps marchait-il ? Il l’avait oublié… Peut-être quelques heures, quelques jours, mois, années, siècles... Quelle importance?… Qui s’en souciait ?… Pas lui, plus lui…

Il régnait en ce lieu une atmosphère lourde et pesante. La température dépassait sans doute les 60°. Pas un nuage à l’horizon, annonciateur d’une petite bise, ou d’un faible rafraîchissement, rien qu’un ciel dégagé, et éternellement pourpre ; monotone.
De temps en temps, il pensait apercevoir un oiseau, mais sans doute s’agissait-il d’un mirage, réalité fictive dans ce monde tangible.

Contre toute attente, une brise légère lui fouetta délicatement la face, lui dégageant le visage de quelques mèches rebelles. D’un geste désinvolte, machinal, il se passa la main dans les cheveux, blancs depuis une éternité.
Il avait stoppé sa marche pantelante depuis un moment. Il était assis sur le sable brûlant du désert, les jambes fléchies, le menton lourdement posé sur les genoux. Réflexions ?… Soumission ?…
Il était là, présent de corps, l’esprit vagabond. Il ne «vivait » que le temps passé, il subissait le temps qui passe. Il avait vécu à une époque depuis bien longtemps révolue.
Les yeux rivés sur le canyon, il se leva. Il se dirigea vers ce gouffre, gueule béante attendant sa pitance… Il s’arrêta au pied du précipice, faisant par la même tomber quelques gravats qui dévalèrent la pente abrupte. Il les regarda tomber, immobile, Le souffle entrecoupé de spasmes irréguliers, à chaque rebond des cailloux dû à la déclivité du terrain.

De temps en temps, il se souvenait de la raison de sa présence en ces terres arides. Il se rappelait alors avoir été jugé, sans pour autant être capable de s’en rappeler la raison… Il avait été reconnu coupable… La Peine : L’EXIL ; il devait souffrir… et il souffrait… En ces moments, il se rappelait être seul en ces terres d’exil, ses terres d’exil…

Il reporta son regard vers le ciel ; toujours rien ; singulièrement pourpre. Aucun signe de vie à part lui, lui et sa misérable existence, lui seul…
Il respira. Un coup, dernière bouffée d’oxygène. Sa jambe s’éleva, avec une lenteur calculée. Et bientôt suivit le reste du corps, ensemble de geste répétés à maintes reprise, alliant la légèreté et la grâce du cygne prenant son envol.
Les yeux fixés sur ce nouvel horizon, il tombait, les bras plaqués contre son corps, la tête en avant, vers cet amas de roches stériles.
Il tombait… Il ne se rappelait plus son crime…
Il tombait… Il ne voulait plus savoir…
Il tombait… Il ferma les yeux, pour ne pas voir l’instant d’impact… de toute façon, il le sentirait…
Il tombait… Il ne revit pas sa vie défiler devant lui, comme beaucoup le prétendent… Foutaises… Sans doute y aurait-il eu trop à voir en un si court instant, ou si peu… instant de toute un vie… De toute manière, il ne voulait pas savoir, il ne le voulait plus…

L’impact fut d’une extrême violence… Il sentit tout d’abord sou cou se disloquer, chacun de ses os se briser en une infinité de particules éternellement indissociables entre elles… puis, vint la douleur… il avait mal… Il sentit ses organes internes exploser un à un, ajoutant au supplice quelque chose d’inhumain… SOUFFRANCE…

Il resta étendu, pleinement conscient. Il voulut se recouvrir les yeux de ses mains, pour cacher ses larmes de la vue de cet unique spectateur présent, le Soleil… Mais celles-ci ne réagissaient plus… amas de souffrance, tremblotantes… Il pleurait… Il se souvenait… L’EXIL… à l’écart de tous et de tout… seule la vie éternelle, l’immortalité, lui avait été « accordé »… ainsi que la souffrance ; l’éternité pour souffrir…
Sublimes supplices…

Des heures durant, il resta couché, là, au fond de son trou. Pourtant il ne fallait pas longtemps pour que s’accomplisse le « miracle » de la reconstitution, cette singulière alchimie qui le remettait sur pied…

Il se releva à grand peine, plus morale que physique. L’abîme de solitude qui s’étendait devant lui était le sien, jusqu’à la fin des temps…

Il souhaitait oublier, une fois de plus… Il y arriverait, mais pour combien de temps ?

Il reprit sa marche solitaire…





FIN.



Lawrence

Par Liri/Spleen, schizo le 29/11/2002 à 13:17:38 (#2671552)

Beau style. Joli.

Par Iko le 29/11/2002 à 13:21:34 (#2671581)

:lit:

Par Ryberald le 29/11/2002 à 14:47:33 (#2672363)

:lit:

...De débuts, il y en a autant de possibles que de grains de sable dans un désert. Quant à une fin... Qu'il rencontre d'autres canyons, indéfiniment ? Qu'il en finisse par oublier l'action même de marcher ? Qu'un évènement extérieur surgisse ?

En tout cas, petit texte, mais beau...

Par Sade le 29/11/2002 à 14:51:26 (#2672386)

Jugement+exil sur une terre de supplice=Enfer

C'est en tout cas un peu le genre de chose qui me viennent à l'esprit. Un peu le mythe de Prométhée .

Par Morethil le 3/12/2002 à 11:53:33 (#2700432)

J'aime bien, même si ton écriture ne semble pas très travaillé. Il manque une chose pourtant : L'action.

je dirait donc que c'est joli, une belle idée, mais c'est presque le simple survol d'un tableau que tu nous propose :)

A toi de voir dans quel sens tu aurait envie d'aller pour approfondir ça. Plus de contrastes dans le tableau ? ou plus une transformation en film ? ;)

Par Dworkyn le 3/12/2002 à 12:02:28 (#2700504)

Il manque une chose pourtant : L'action.

Il n'en manque pas, je n'en ai jamais voulu :)

mais c'est presque le simple survol d'un tableau que tu nous propose

Tout à fait, le but recherché est atteint.

même si ton écriture ne semble pas très travaillé

Je ne me prétends pas écrivain. Moi je suis juste un simple lecteur, qui de temps en temps aime à prendre sa plume et placer quelques mots sur une feuille vierge.
Mais j'aimerais savoir, à quel niveau mon écriture n'est pas assez travaillée? Juste pour que la critique soit constructive :)

Par Morethil le 3/12/2002 à 12:34:47 (#2700796)

Provient du message de Dworkyn
Il n'en manque pas, je n'en ai jamais voulu :)
Tout à fait, le but recherché est atteint.


Sans prétention aucune, je te donne mon avis.

Dire que ce que tu écrit comme le survol d'un tableau, c'est une manière de dire que l'écrivain (l'auteur) se contente de regarder un tableau, et de le décrire.
Il n'y a pas d'implication réelle de ta part. De fait, le lecteur aura encore plus de mal a s'impliquer. Et encore plus de mal à s'identifier, il ne pourra pas rentrer dans ton histoire, ne cherchera pas de fin, et encore moins de début, comme tu le propose.
Donc c'est un essai (une pensée) plutôt qu'une oeuvre.


Je ne me prétends pas écrivain. Moi je suis juste un simple lecteur, qui de temps en temps aime à prendre sa plume et placer quelques mots sur une feuille vierge.
Mais j'aimerais savoir, à quel niveau mon écriture n'est pas assez travaillée? Juste pour que la critique soit constructive :)

Ca rejoint ce que j'ai mis plus haut. Sauf que là on parle des moyens pour y arriver.
J'ai l'impression que ton écriture est spontanée, que tu a quelques idée, que tu cherche a donner un rythme, mais très vite tu le perd pour une sorte de non rythme (ce n'est pas la même chose qu'un rythme cassé).
tu écrit tel que ça viens, tu prend les mots au fur et a mesure, et tu décris ton idée, les images que tu vois.
Donc comme je te le disait sur le précédant message : Ca peut être amélioré en approfondissant le but recherché (le tableau), l'aspect mental. Ou "classiquement" avec plus de mouvement, plus de rebondissement, plus de surprise, bref, de l'action.

Par exemple pour ce qui est du mental, tu pourrait ajouter plus de sentiments, de sensations, de réflection, de la part du personnage. Si lui même cherche à comprendre ce qui lui arrive (plutôt que de se contenter de sauter d'une falaise). Ajouter des contrastes et des couleur, laisser des blancs, peindre quelques traits indiquant des direction possible, etc.

Si tu décide de t'orienter vers l'action, alors il faut donner plus de puch a ton personnage et a ta nouvelle, et faire agir ton marcheur plutôt que de le laisser subir.

Mon sentiments donc, c'est que tu reste entre deux eaux.

En général on parle de choses qui nous ont marqué, pas de choses qui nous laissent indifférent (a moins qu'on veuille "faire la conversation"). En tant que lecteur j'ai envie de savoir pourquoi l'histoire de cet homme t'a marqué plus que d'autres que je peux connaître du même genre.

Quelques exemple : Altlas, Hypérion, le mec dans les idée noir de Franquin qui est dans une planète labyrinthe (et lui en plus il a un guépard pas loin), le radeau de la méduse, Papillon (le bagnard, etc).

Voilà.

Par Dworkyn le 3/12/2002 à 16:39:13 (#2702639)

le mec dans les idée noir de Franquin qui est dans une planète labyrinthe (et lui en plus il a un guépard pas loin)

Surtout, ne pas péter !! :D

Pour le reste, que dire... J'ai écrit ça il y a plus de dix ans. Pourquoi, je ne sais pas. Comment, avec un crayon et une feuille :D . Mon état d'esprit du moment, je ne m'en souvient pas. Mais, comme tu le dis, j'ai juste dépeint une scène de vie *De non vie même si on regarde bien*. En voulant proposer aux lecteurs de ce forum d'écrire une suite, ou un début à cette scène, n'avait d'autre objectif que de créer de l'action, de répondre à des questions *Pourquoi l'Exil? Pourquoi l'Immortalité? ...*. Mais aussi permettre à d'autre, de laisser aller leur imagination, de compléter le tableau, de lui donner vie.

J'en ai déjà eu l'envie, j'y ai déjà réfléchi, sans pour autant prendre le temps de mettre sur papier mes idées. J'avoue, je suis un gros fainéant :D . A moins que mes idées, je ne les ai pas jugées assez bonnes. Mais une chose est certaine, ce n'est pas une "nouvelle". Ni un essai. Tout juste une tranche de vie imaginaire et un peu fantastique lâchée sur papier.

Que dire de plus... Mon seul but était de faire travailler votre imagination, de vous donner l'envie de faire ce que moi je n'ai pu faire *Manque d'envie, de temps, d'imagination, de capacité, que sais-je encore*.
Visiblement, c'est raté :)

Et pourtant, normalement, de l'imagination, je n'en manque pas. Du moins c'est ce qu'on me dit. Je dois être entouré de menteur. Ou bien, je bride mon imagination inconsciemment... Ou bien, ais-je peur d'écrire, peur de ne pas être assez original, de ne reproduire que le produit de mes nombreuses lectures.
Enfin... Peut-être un jour arriverais-je à faire quelque chose de manière correcte et complète.