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Une vieille histoire...

Par Domon le triste le 24/7/2002 à 14:50:48 (#1854025)

Il y était presque. Encore un pas et … Il esquiva prestement le coup et se fendit en avant. L’acier résonna contre l’acier, et une épée alla terminer son court vol en allant se ficher dans le sol quelques mètres plus loin.
« Har har, bien joué mon gars, tu deviens très fort ! » le félicita l’homme désarmé.
« Merci du compliment » répondit simplement l’adolescent.
Assez fin, doté d’une musculature noueuse, Domon Brugh n’en était pas moins un épéiste remarquable. Du haut de ses 15 ans, il parvenait a défaire régulièrement en duel son vieux maître d’armes, Ragan Vernion. Ce dernier regardait son élève avec un large sourire, sourire qui pliait laidement la balafre qui lui entaillait la joue. Il l’avait reçue quand il était dans l’armée, disait il, sous les ordres d’Alexandre, il y avait de nombreuses années. C’était un homme dur, qui avait sacrifié sa jeunesse a son royaume, et pourtant il ne regrettait rien. Il avait vu plus de contrées que la plupart de ses compatriotes, et y avait gagné une réputation non seulement de dur a cuire, mais aussi d’excellent soldat, ce qui lui valait un grand respect de la part de la plupart des gens. Et sa solde n’était pas mal non plus. Maintenant, a 53 ans révolus depuis quelques mois, il occupait un poste d’entraîneur dans une des salles d’armes de la capitale, enseignant aux fils de nobles les arts du combat, et venant si nécessaire en aide aux miliciens de la ville. Chacun à SilverSky le connaissait, et le respectait.
Il alla récupérer son épée. Oui, décidemment, ce gamin était prometteur… Il l’avait rencontré deux ans auparavant. Le jeune garnement s’était introduit dans la salles d’armes par une fenêtre, sans que personne ne le remarque. Il revoyait encore la scène.
Il arrivait dans la remise, et était tombé sur le loustic, en train de fouiller dans les épées d’entraînement émoussées.
« Par les couilles d’Artherk, qu’est ce que c’est que cette petite fouine sélénite ! » s’était il exclamé.
D’un cri, Domon s’était retourné, et, pour se défendre, avait empoigné une épée. Amusé, Ragan l’avait regardé faire de grands moulinets désordonnés pour le tenir a distance, puis d’un revers de la main la lui avait arrachée des mains, avant de l’attrapper par la peau du cou. Le jeune garcon avait glapi de peur mais s’était mis a le frapper de toutes ses forces pour le faire le lacher. Ce qui finit par provoquer l’hilarité du vieux soldat, qui restait insensible a ces manifestations de fureur désespérées.
« Héhé, c’est pas une fouine qu’on a là, mais un petit chiot ! Et il mord en plus le bougre ! Har har ! »
Le reposant au sol, il lui avait asséné un des bonnes claques dont il avait le secret, et lui demanda sans autre forme de proces.
« C’est quoi ton nom le mioche ?
_Do… Domon m’sieur
_Et t’as pas honte d’agiter comme ca une épée dans MA salle d’armes bougre d’ane !! » rugit Ragan.
Puis, se reprenant : « Tu voudrais que je t’apprennes ? »
Le jeune garçon resta sans voix un instant, puis se mit a hocher frénétiquement la tête en signe d’assentiment. Depuis lors, ils s’étaient entraînés tous les jours, en début de matinée, et maintenant, Ragan avait le sentiment d’avoir réussi. Domon, à 15 ans, était techniquement aussi bon épéiste que lui-même. Oh, bien sur, il ne maitrisait pas les autres armes à la perfection, mais il ne voulait pas en faire un guerrier totalement polyvalent. Ce qui lui manquait, a vrai dire, c’était de vraies expériences du combat. Il haussa les épaules. Cela lui viendrait bien assez vite, Brehan lui en était témoin.
« Ragan ? »
La voix de son élève le tira de ses pensées. Il le regardait avec un large sourire. Non, décidemment, le mioche n’avait encore jamais connu de vraies batailles.
« Je … Demain, le maître d’Armes reçoit les candidats souhaitant s’engager dans l’armée. Je vais m’y présenter. »
Malgré une légère hésitation en début de phrase, il l’avait débitée rapidement, comme si il craignait d’être interrompu. Ce en quoi il n’avait pas tout a fait tord.
« Qu’est ce que c’est que cette idée la encore ? T’engager ?! Parce que tu crois que tu sais manier une épée, tu te vois déjà héros de guerre ! » Tonna le vieux maître.
_Ragan…. Tu avais mon age quand tu es entré dans l’armée, et la situation était plus agitée a l’époque. Nous sommes en paix avec Angélus, que pourrait-il bien arriver ? Je veux voyager, et servir notre Roy à la mesure de ce que je sais faire ! Ca n’est pas une noble ambition ? Je t’en prie, Ragan !
_Hmpf » Grogna le vétéran. « Je sais ce que c’est que l’ost, tu peux me croire. Et je m’inquiète de ce que tu risques d’y devenir. Certains disent que ça forge le caractère. Foutaises oui ! Ca endurcit les plus durs, et ça écrase les autres, voila le sain effet de l’armée sur les caractères ! J’ai peur que tu sois encore un peu tendre pour intégrer les rangs.
_Mais…
-Laisse moi finir veux tu ! Malgré cela, je vois que tu es déterminé dans ton choix, aussi je vais non seulement te laisser y aller, mais aussi glisser quelques mots en ta faveur aux officiers chargés du recrutement. Tu sais te battre après tout. » ajouta-t-il en souriant.
A ces mots, Domon bondit de joie et lui sauta au cou pour le remercier. Lui tapotant la tète, Ragan ne pu s’empêcher d’émettre une triste pensée. Trop jeune, trop impulsif…
« Allez, files ! Tu as sans doutes plein de choses a faire aujourd’hui en prévision de demain ! » lui dit il en lui assénant une claque dans le dos. Quand a moi, j’ai besoin d’aller prendre une chope, j’ai le gosier sec de t’avoir entraîné, gamin ! » ajouta t il d’un ton bonhomme.
Domon s’écarta alors, et s’élança vers la porte en lui faisant de grands signes de la main. Ragan le regarda partir, songeur.

Par Domon le triste le 24/7/2002 à 17:48:29 (#1855073)

« L’aisselle du Troll » était encore a moitié vide alors que Ragan en poussait la porte pour aller s’installer à sa table habituelle. Il constata avec déplaisir qu’elle était occupée par un homme bien habillé d’un pourpoint de soie rouge, et qui se restaurait. Il caressa un instant l’envie déloger l’intrus à grands coups de pied dans le derrière, puis finalement alla s’asseoir a la table voisine, en hélant le tavernier pour une pinte. Quelques jeunes gens étaient attablés a quelques mètres , et parlaient avec excitation et force gestes des exploits militaires qu’ils accompliraient lorsqu’ils seraient dans l’armée. Ils seraient décorés, pour sur ! Leur bravoure serait connue de tous, et tous trembleraient à l’idée de s’en faire des ennemis.
« En tout cas, les taverniers y perdraient beaucoup » se dit Ragan en comptant le nombre de chopes vides sur la table. Apparemment les jeunots avaient passé une bonne partie de la matinée à palabrer sur leurs exploits futurs.
Il reporta son attention sur le marchand qui occupait « sa » table. Un angélusien sans doute, à son air précieux et a ses mimiques dégoûtées alors qu’il portait a sa bouche son ragoût. « Sacré Sang, le meilleur ragoût de la capitale ! Ces étrangers sont vraiment bizarres ! »se dit il. Le marchand leva les yeux vers lui, et le vieux soldat ne put s’empêcher de lui adresser son regard le plus menaçant. A voir avec quelle rapidité il baissa le nez, on eut dit qu’il trouvait soudain son ragoût bien plus attrayant.
Buvant une longue gorgée de son Ale, Ragan laissa ses yeux se fixer dans le vide, et dériva dans ses pensées alors que le liquide alcoolisé le réchauffait lentement. Domon allait partir à l’armée. A la Guerre peut être, se dit il en repensant à l’Angelusien. Il secoua la tête. Il était sa seule famille, et il devait bien avouer s’être attaché au jeune garçon. Le voir partir, même pour un vieux soldat tel que lui, serait un crève cœur. L’hivers qui avait suivi leur rencontre, la mère de Damon était morte de maladie. Son père étant décédé quelques années auparavant, le jeune garçon se retrouva seul. Il l’avait donc recueilli, et depuis tout ce temps il en était venu a le considérer comme son fils. Vrai ! Ca ne serait pas facile de le laisser partir…
Reprenant une gorgée d’Ale, il laissa de nouveau ses pensées vagabonder, chassant au loin tous ses mauvais pressentiments. Il irait au château le recommander cet après midi, c’est le mieux qu’il pouvait faire …

Par Domon le triste le 24/7/2002 à 21:58:05 (#1856273)

« Bonjour Idas ! Je voudrais voir ce vieux renard de Mordrick ! Il est là ? » demanda Ragan en saluant.
_Oui maître Vernion, vous le trouverez dans ses quartiers. » lui répondit le garde.
Ragan entra dans le palais. Par Brehan qu’il aimait cet endroit ! Cela représentait tout ce pour quoi il s’était battu pendant ces années. Il aimait ces murs épais, centenaires. Il aimait le claquement de ses bottes sur le sol dallé. A chaque fois qu’il venait ici, il lui semblait replonger dans le passé, ce jour où il s’était engagé a servir Goldmoon.
Enfin, il distingua la silhouette de son vieil ami Mordrick Maensel. Ils avaient pris les armes ensemble il y avait de cela de longues années, mais lui avait choisi une retraite civile, tandis que son ami avait préféré rester dans la garde du palais. Il avait souvent tenté de le convaincre de rempiler, mais toujours Ragan refusait, en émettant la même réponse.
« Je suis trop vieux, et j’ai eu mon compte d’émotions. Former des soldats m’aigrirait, car je saurais qu’ils participeraient a des campagnes ou je n’aurais jamais ma place. J’accepte tout simplement de vieillir, voila tout. »
« Alors Mordrick, comment vas-tu, vieux sacripan ! lui lança t il.
_Ragan mon vieux ! Content de te revoir, ça fait une paye ! Oui, je vais bien, et toi donc ? Décidé à tenter ta chance demain ? ajouta t il avec un sourire.
_Eh bien justement, c’est à propos de ça que je viens te voir. Tu te souviens de mon élève, le jeune Brugh ? Il veut intégrer les rangs.
_Et toi tu viens me le recommander, c’est ça ?
_Exactement. Il est bon, très bon même, mais je doute qu’il aie le caractère assez trempé pour tenir. Il n’a jamais participé a un vrai combat tu sais.
_Mhh oui je vois …Mais si tu dis qu’il est bon, je le prendrai. Quand a ses capacités au combat … nous le verrons assez vite . ajouta t il sombrement.
_Comment cela ?
_J’ai surpris des conversations entre le Chambellan et le Maître d’Armes… La situation avec Angelus se dégrade de jour en jour. Ils deviennent de plus ne plus exigeants …
_Une Guerre ?
_Envisageable. Je dirais presque que la décision a déjà été arrêtée en hautes sphères. Ils n’attendent que l’incident diplomatique pour tout lâcher.
_Inquiétant ce que tu me racontes la…
_Ne t’en fais pas, je veillerai sur ton protégé.
_Merci l’ami ! » Répondit Ragan. Mais il n’était qu’à moitié rassuré.
_Bon, je te laisse, j’ai à faire. » Lui annonça Mordrck.
_A bientôt !
_A bientôt Ragan ! »
Il regarda son ami s’éloigner, les plaques de son armure crissant les unes contres les autres. Une guerre, par Brehan ! Et il allait laisser Domon se jeter là dedans …Bah, après tout, le garde n’avait émis que des suppositions, Avec un peu de chance, il se serait trompé.
Avec de la chance …
Pensif, il sortit du château dans la lumière éclatante de l’après midi. Mais il n’y fit guère attention. Son esprit était ailleurs. Au milieu des terribles batailles auxquelles il avait participé, où il avait failli maintes et maintes fois perdre la vie. Il se demandait si l’histoire était destinée a se répéter éternellement de génération en génération.

Par Domon le triste le 25/7/2002 à 20:56:34 (#1859173)

Le jour venait à peine de poindre que déjà la ville bourdonnait d’activités. Domon sauta à bas de son lit et s’habilla prestement. Il choisit un solide pourpoint de cuir bouilli, et ceignit son épée. Il était fin prêt.
Sans s’attarder pour prendre un petit déjeuner, il sortit en courant de la maison. Comme il s’y attendait, il ne croisa pas Ragan : le vétéran devait déjà être à la salle d’armes à préparer la journée. D’un pas alerte, le jeune garçon se dirigea vers les halles. L’endroit était fortement animé alors que les marchands vantaient sous les arcades les mérites de leur étal. Domon dut jouer des coudes pour la traverser, grommelant contre l’idée qui l’avait fait passer par ici plutôt que de contourner la halle centrale. Il ne fallait pas qu’il soit en retard !
Enfin, sortant de la masse grouillante du marché, il put de nouveau voir le ciel au dessus de sa tête, et le château qui se trouvait devant lui. Il avait fière allure en ce jour. Une légère brise faisait claquer les bannières qui trônaient fièrement au dessus des deux tours de garde. Des gens allaient et venaient, tout à leurs affaires, par le porte principale, où seulement deux gardes surveillaient les allées et venues.
« Des gardes du palais » pensa Domon. « Un jour, je serai comme eux, un soldat exemplaire. Peut être m’attachera ton à la protection du Roy même ? ».
Le jeune garçon avait la plus grande admiration pour ces hommes qui avaient voué leur existence au Roy. Sans doute tenait il cela de son vieux maître.
Mais il n’était pas la pour visiter le palais. Se renseignant rapidement, il se dirigea vers la pièce où les candidats devaient se présenter. Ses pas claquaient agréablement sur les dalles.
Lorsqu’il arriva, il en eut le souffle coupé : il y avait déjà près d’une centaine de personnes, et il en affluait de tous cotés.
Apres quelques dizaines de minutes, les arrivées dans la salle cessèrent. Il y régnait un brouhaha important. Survint alors un homme vêtu d’une imposante armure de plaques, qui vint se places sur une estrade contre le mur. A ses cotés vinrent se placer deux hommes, l’un en armure également, l’autre en robe. Il les connaissait tous les trois. Devant lui se tenaient rois des hommes les plus importants du palais, voire du Royaume.
Le premier à être entré, vêtu de sa somptueuse plaque de cérémonie, était le maître d’armes du Roy, Alexandre, qui allait présider cette réunion. Le second individu, également recouvert de métal, était le capitaine de la garde du Palais, Mordrick Maensel. Domon le connaissait surtout de réputation, bien que son père adoptif et lui soient très amis. On le disait dur, mais intègre. De l’avis général, il remplissait sa fonction au mieux, à tel point que, malgré son age avancé, personne n’avait envisagé de lui trouver un successeur.
Le troisième personnage était de loin le plus inquiétant de tous. Il frissonna involontairement en posant son regard sur cette forme encapuchonnée dans cette robe blanche. On pouvait distinguer deux yeux noirs, tels deux billes d’obsidienne, qui malgré leur immobilité apparente, semblaient scruter la pièce attentivement. Son visage était également impassible. Un visage buriné, à la peau mate, sans age. On disait de lui qu’il était derrière toutes les catastrophes naturelles du royaume. Les mères en menaçaient leurs enfants indisciplinés, ce qui avait bien plus d’effet que de parler d’orcs ou de trolls. Mais à vrai dire, à part que le Roy l’avait rappelé de l’exil ou son père, feu sa majesté Théopold, l’avait envoyé il y avait maintenant plus d’un siècle –« Un siècle ! Rien que ça ! M’étonne pas qu’on raconte des trucs sur lui » se dit Domon en adressant une courte prière a Artherk- personne ne savait rien de lui. Mais il était là, lui, Lycaos, grand mage de guerre du Roy, et personne n’oserait lui demander des comptes.
Le maître d’armes prit la parole.
« Jeunes gens de Goldmoon ! Je vois avec plaisir que vous avez répondu nombreux à notre appel ! C’est une grande fierté pour notre royaume que de vous voir tous ici en cette salle, prêts à servir votre Roy ! »
Il marqua une pause, et pas un bruit n’était audible.
« Vous n’êtes pas sans savoir que la tache pour laquelle vous postulez aujourd’hui ets des plus ardues ! Elle vous demandera un engagement de chaque instant. En tant que soldat de sa majesté, qu’Artherk le bénisse de sa Lumière, vous donnerez votre vie à votre souverain et à votre royaume. Vos autres engagements devront passer au second plan, ais c’est au prix de grands sacrifices que se construit une grande gloire ! »
Murmures d’approbation dans la foule.
« Vous serez amenés a voyager énormément, et sans doute à combattre tout autant, mais n’oubliez jamais ! Tout ce que vous ferez, cela sera pour la plus grande gloire de Goldmoon, pour votre Roy, sa majesté Théodore XIII ! Longue Vie au Roy ! »
« LONGUE VIE AU ROY ! » rugirent en cœur les auditeurs.
Domon était véritablement enthousiasmé. Tout ce dont il avait rêvé allait se réaliser bientôt !
Le Maître d’Armes reprit.
« Les examens destines a vous déterminer aptes ou non au service auront lieu dans une pièce attenante, Bonne chance à tous ! »
Sur quoi il fit un pas en arrière. Il échangea quelques mots avec le mage à voix basse, puis tous deux disparurent. Mordrick, resté seul, descendit de l’estrade, puis se dirigea vers une porte. De là, Il fit signe à la foule que les examens y auraient lieu. A peine l’eut il franchi que les jeunes hommes commencèrent à y entrer en file indienne. Domon prit patiemment son tour.
Quand enfin, au bout d’une heure environ, il arriva, il se retrouva face au capitaine des gardes du palais.
« Alors mon gaillard, quel est dont ton nom ? » Lui demanda t il d’un ton bourru.
_Domon Brugh, Capitaine.
_Ah, c’est toi ! Je commençais à désespérer de te voir arriver. Bon, tourne toi un peu que je voie si tu as la carrure. »
Tout en s’exécutant, Domon fut d’abord surpris de la réaction du capitaine, puis se souvint que Ragan lui avait promis de glisser un mot en sa faveur.
« C’est bon, soldat Brugh ! lui dit Mordrick. Demain, cour arrière du château, au point du jour. Rompez ! »
Domon ne se le fit pas dire deux fois. Saluant maladroitement, il sortit en courant du Palais, décidé à annoncer la bonne nouvelle à Ragan le plus vite possible. Il le trouva comme il s’y attendait à la salle d’armes, fourbissant les épées d’entraînement.
« Ah te voila garnement ! J’vois à ta tête que ça a été une réussite «
Domon, trop heureux, ne fut capable que d’acquiescer frénétiquement.
« Eh bien , c’est pas une raison pour rester là les bras croisés comme un sacré bon sang d’Sylien ! Attrape ça ! » bougonna t il en lui lançant une épée. « Un soldat, ça s’entraîne, alors hop, au travail ! » grogna t il, mais sans parvenir à cacher son sourire.
Et, comme chaque jour, Domon s’attela avec ardeur à son entraînement.
« Sans doute mon dernier entraînement civil ! » se dit il avec fierté.

Par Domon le triste le 26/7/2002 à 19:07:54 (#1864567)

C’était la guerre. La nouvelle s’était répandue telle une traînée de poudre dans la Capitale. L’ambassadeur angélusien avait eu le front d’exiger du Roy qu’il se soumette en tant que vassal au Roy Tempérance IV. Devant son refus, l’angélusien avait alors proclamé la déclaration de guerre, et s’en était retourné avec sa suite. La nouvelle avait atteint les cours d’entraînement des jeunes recrues très rapidement, aussi Domon fut il l’un des premiers à l’apprendre. Son cœur battait à tout rompre. La Guerre par Brehan ! Il allait partir à la guerre. Il se sentait empli d’un étrange mélange d’excitation et d’appréhension. Leur entraînement s’était également modifié, dans la mesure ou ils devraient être mobilisables le plus vite possible. Mordrick ne leur enseignait plus les protocoles militaires comme ils avaient commencé à le faire dans la matinée, mais bel et bien comment frapper dans les défauts d’une cuirasse pour tuer son occupant. Une frénésie née de l’urgence de la situation régnait dans le camp d’entraînement. Ils savaient tous que, une fois leur préparation sommaire achevée, ils seraient envoyés au front combattre l’ennemi.
La journée finit par toucher à sa fin. Domon était fourbu : on ne leur avait accordé qu’une pause d’une vingtaine de minutes pour avaler en vitesse un maigre repas, avant de les replacer devant leurs mannequins d’entraînement. Avant de leur donner quartier libre, Mordrick leur expliqua qu’ils seraient mobilisés sur le terrain d’ici une semaine.
Domon quitta le château, perdu dans ses pensées. Partout autours de lui les gens n’avaient qu’un sujet de conversation, et la haine de l’angélusien était palpable dans l’air. Un attroupement devant l’Aisselle du Troll attira son attention, et il ralentit le pas afin de questionner un badaud.
« Un de ces chiens d’Angelusiens ! cracha t il. Ils l’ont attrapé et se sont occupé de lui ! »
S’abstenant de demander de quel « ils » il s’agissait, Domon poursuivit son chemin. Pareilles scènes risquaient de devenir monnaie courante désormais, et il devait s’endurcir. Il en verrait d’autres maintenant qu’il était soldat.
Il marcha encore quelques minutes avant d’arriver chez lui. Il poussa la porte qui s’ouvrit dans un grincement, puis pénétra dans la maison. Il y trouva Ragan, dans la remise, qui fouillait dans de vieilles malles poussiéreuses. Ce dernier, sans lever le nez un instant de l’objet de ses recherches, lui lança :
« Je suppose que tu as appris la nouvelle Mhh ?Bien sur, puisque tu as passé la journée au château. »
Il soupira, chose inhabituelle chez lui.
« Et je suppose que tu sais ce que ça signifie ? La guerre mon bonhomme. Fini de frapper des bonshommes en bois, finis les combats amicaux à coup de lame émoussée. Non, en fait je pense que tu n’en as pas la moindre idée. »
Il se retourna, plantant son regard dans celui de son fils adoptif. Ses yeux étaient graves, sans la moindre trace de l’étincelle de malice qui y apparaissait d’habitude lorsqu’ils discutaient. « Un regard froid … » se dit Domon.
Non, laisse moi t’expliquer. D’ici une semaine, tu tueras ton premier homme. Sans doutes. Puis le deuxième, puis le troisième. Tu laisseras toute ta sensibilité, toute ton innocence, ton enfance, derrière toi, et à jamais. Et si jamais tu ne daignais pas faire ce sacrifice, ils prendront ta vie, sans hésiter. Tu verras tes amis et tes proches tomber à tes cotés, tu les pleureras au début, oh oui … Tout comme tu pleureras sur tes remords de devoir tuer un peu plus chaque jour. Puis peu à peu, tes larmes se tariront, tes yeux sécheront. Et à chaque coup d’épée, quand tu moissonneras les têtes et trancheras des membres, ça ne sera plus la rage qui t’animeras, mais l’instinct, te poussant à tuer pour vivre, pour survivre. Et la, quand tes frères d’armes tomberont, tu ne leur accorderas plus un regard. Tu ne tueras plus leur meurtier par esprit de vengeance mais parce qu’il se dresse devant toi, simplement, et tu ne te sentiras plus affligé par sa mort. Impassible. Tu resteras indifférent à la mort que tu auras porté chez les autres, indifférent à ce qui t’entoure, si ce n’est à ta lame et à celui qui se tient devant toi. Alors, oui, alors, tu seras devenu un soldat… Qu’elle soit bénéfique, ce dont je doute, ou non, cette transformation arrivera. Elle arrivera, ou tu sombreras dans la folie, et une nuit tu retourneras ton arme contre toi, qu’elle se teinte une dernière fois de sang, de ton sang, pour te faire expier. Voila les choses telles qu’elles seront. »
Domon était glacé. Jamais son vieux maître n’avait fait d’aussi long discours, jamais auparavant il n’avait parlé avec autant de ferveur, ouvrant son cœur de cette manière. Le jeune garçon prit alors conscience de ce qu’avait été l’existence de Ragan, des cauchemars qui avaient du le hanter, de toutes les horreurs qu’il avait pu contempler, et de la façon dont l’armée lui avait volé sa vie. Par le sang, dans quelle situation allait il s’engager ? Incapable d’émettre le moindre son, il restait figé par la tirade du maître d’armes, tel une statue de sel. Et Ragan le regardait. Il n’avait pu s’empêcher de lui dire, de l’avertir de ce au devant de quoi il allait. Oh bien sur, il savait qu’il était trop tard pour reculer maintenant. Il savait que désormais il avait instillé le germe de la peur en son élève, et que cette peur avait plus de chances de lui coûter la vie que de la lui sauver. Malgré tout, il ne parvenait pas a s’ôter de l’idée que ces avertissements lui seraient bénéfiques. Se plaint on d’être réveillé à coups de pieds si c’est pour éviter de se faire trancher la gorge ?
Rompant le silence, Ragan reprit.
« J’ai entendu dire que les aspirants seront placés en caserne des demain, pour des raisons de sécurité, donc autant que je te donne ça tout de suite. »
Il plongea les mains dans un coffre et en ressortit une armure de plaques.
« C’était la mienne pendant mes années de service. Elle est sans doute encore un peu vaste pour toi, mais ça te protégera toujours mieux que cette cochonnerie de maille qu’on te donnera. »
Il sortit les pièces unes a unes, les disposant avec précautions sur une toile au sol.
« Elle est tout ce qu’il y a de plus ordinaire, rien de magique comme on lit dans les contes. Du bon vieil acier. Les articulations et les courroies sont en bon état, je les ai graissées pendant toutes ces années. Et je tiens également à te donner ceci. ».
Il ressortit de la malle une forme oblongue enroulée dans du tissus gris. Dévoilant son contenu, Ragan fit apparaître une lame brillante, bien que constellée par endroits de petites taches brunes. Une belle épée, dont la garde semblait malgré tout bien plus fonctionnelle qu’ornementale. Et autant que Domon pouvait en juger, la lame était terriblement affûtée.
« Je te présente Morsereg, mon arme. Celle-ci est bel et bien enchantée par contre. » Murmura t il. « Son tranchant ne s’émoussera jamais et … » Il grimaça. « Elle est vivante. Oh bien sur, pas come un chie ou un cheval, mais elle a des pulsions, et une conscience, bien que ténue… C’est une arme très dangereuse que je te remets là, mais elle m’a sauvé la vie maintes fois, et j’ai le sentiment qu’il en ira de même pour toi. »
Domon eut un regard interrogatif.
« Non, je ne te dirai pas comment je suis entré en sa possession. Un jour peut être, mais pas maintenant. Mais pour l’heure, remballons tout cela, tu les emmèneras demain avec toi. Allons manger. »
Rangeant les pièces d’armure et la lame dans un baluchon, Ragan avait le cœur serré. Il allait être séparé de son élève. Il pria intérieurement qu’il s’en sorte indemne.
« Ne t’inquiète pas. » résonna une voix dans son crâne. « Je veillerai sur lui, mon vieil ami… »
Hochant la tête, il termina le paquetage et se releva. Puis il prit Domon par l’épaule et l’entraîna dans la pièce principale pour préparer le dîner.
Il serait veillé, soit. Mais devait il s’en réjouir ?

Par Domon le triste le 27/7/2002 à 2:17:29 (#1865951)

Les rumeurs étaient fondées. Le lendemain, on annonça aux recrues qu’elles seraient à partir de maintenant placées en caserne. Tous accueillirent la nouvelle avec un enthousiasme mitigé, mais aucune protestation ne s’éleva.
Cela faisait déjà cinq jours, et leur formation était déjà presque achevée, quand Mordrick convoqua le petit groupe auquel appartenait Domon.
« Bien. » Entama t il. « Je vous ai convoqués car vous êtes ceux de ma section dont l’entraînement est le plus abouti, et que nous avons besoins de soldats pour une mission simple, sans pouvoir en détacher d’autres divisions. »
Il fit une pause en scrutant la vingtaine de visages devant lui.
Aussi, vous allez être envoyés dans les montagnes, au sud est de Raven’s Dust. Des rumeurs circulent comme quoi un campement angelusien aurait été établi la bas. Je voudrais que vous alliez faire un travail de reconnaissance. Ne prenez pas de risques inutiles. Si vous constatez une présence ennemie, relevez sa position et revenez. Vous partez dans une heure. Rompez. »
Chacun regagna alors les baraquements pour se préparer. Domon brûlait d’excitation : il allait enfin prendre une part active a cette guerre ! Il ne pensait à rien d’autre en assemblant les pièces de métal de son armure. Il l’avait déjà essayée a plusieurs reprises auparavant, et l’avait trouvé étonnement confortable pour une cuirasse de cette taille, et le laissant libre de ses mouvements. Ragan s’en était vraiment bien occupé durant toutes ces années. Enfin, une fois harnaché convenablement, il ceignit Morsereg. Ressentant comme a chaque fois des picotements dans les bras et la nuque, il se demanda une fois de plus comment un soldat tel que Ragan Vernion avait pu entrer en possession d’une arme comme celle la. Il faudrait vraiment qu’il l’apprenne un jour.
Sur ce, Domon se dirigea vers ses compagnons qui l’attendaient a l’extérieur. Puis ils se mirent en route.

Par Domon le triste le 29/7/2002 à 3:55:15 (#1870764)

Apres quelques heures de marche, ils parvinrent en vue de la cote sud ouest de l’île. Le soleil, qui n’avait pas encore atteint son zénith, se reflétait en faisait miroiter les vagues. Nulle trace de présence ennemie, mais les rumeurs les rapportaient plus au nord.
Ils de rester sous couvert de la foret plutôt que de longer la cote. Ils seraient abrités en cas d’embuscade, et Brehan savait que les angelusiens étaient de bons archers.
Une heure s’écoula encore, sans rencontrer âme qui vive. Puis, ils commencèrent à entendre des bruits, puis des voix. Ils firent silencieusement halte. Le campement devait être très proche maintenant. Ils tendirent l’oreille afin d’espionner les conversations, et ce qu’ils perçurent les glacèrent d’effroi. Les angelusiens avaient mené des incursions secrètes en Goldmoon, et avaient placé des Marques. Celles cis permettraient ensuite à leurs mages d’ouvrir des portails sur la longue distance entre leur royaume et Goldmoon, y faisant pénétrer massivement leurs troupes.
D’un commun accord, et décidant qu’ils en avaient assez entendu, les soldats firent demi tour afin de venir rapporter tout cela au capitaine le plus rapidement possible. Ils parcoururent une lieue environ, avant de tomber sur des éclaireurs angelusiens. Ceux-ci étaient en infériorité numérique, une quinzaine environ, mais ils avaient pour eux d’être des soldats aguerris.
Le combat s’engagea des qu’ils se trouvèrent face a face. Un compagnon de Domon s’écroula dans un gargouillis sinistre, la gorge transpercée. D’un geste vif, le jeune homme eut tout juste le temps d’écarter la lame qui plongeait vers lui pour lui faire subir le même sort. Il était encore sous le choc, mais se força a se concentrer en se rappelant les paroles de son maître. Si il faiblissait, ne serait ce que quelques instants, il serait perdu. Gardant cela a l’esprit, il se rua vers son adversaire, brandissant Morsereg au dessus de sa tête. L’angelusien para le coup sans difficulté, étonné toutefois de la force avec laquelle il avait été porté. Ils tournaient l’un autour de l’autre, portant des attaques tantôt vicieuses tantôt brutales. Domon commençait a se fatiguer, et quelques coups frappèrent brutalement sur sa cuirasse, sans toutefois heureusement réussir à l’entailler. Soudain, il eut m’envie irrésistible de se retourner pour frapper derrière lui. Malgré l’apparente imprudence que constituait le fait de tourner le dos à son adversaire, il céda à la pulsion et frappa. La tête de l’angelusien qui avançait dans son dos pour l’embrocher roula à terre dans une grande éclaboussure de sang. Se retournant a nouveau, il lança puissamment son bras derrière lui. La consternation se peignit, mêlée de douleur, sur les traits de son précèdent adversaire, alors que Morsereg tranchait sans mal les épaisses mailles de sa cotte d’armes, déchirant les chairs non protégées qui se trouvaient en dessous.
Domon, haletant, se retourna une fois encore. Il n’entendait plus un bruit. Ses compagnons, du moins les sept qui restaient debout, le regardaient d’un air incrédule. Haussant les épaules, il leur fit signe qu’il etait grand temps de se remettre en route. La nouvelle était d’importance, et la rapporter au plus vite pourrait sauver beaucoup de vies.
Ils reprirent leur marche silencieuse, triste d’avoir perdu une douzaine des leurs. Mais malgré cette tristesse, Domon crut percevoir tout au fond de lui un rire satisfait.

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